Genèse 15
7 Il lui dit: «C'est moi le SEIGNEUR qui t'ai fait
sortir d'Our des Chaldéens pour te donner ce pays en possession.» -
8
«Seigneur DIEU, répondit-il, comment saurai-je que je le posséderai?»
9
Il lui dit: «Procure-moi une génisse de trois ans, une chèvre de trois ans, un
bélier de trois ans, une tourterelle et un pigeonneau.»
10
Abram lui procura tous ces animaux, les partagea par le milieu et plaça chaque
partie en face de l'autre; il ne partagea pas les oiseaux.
11
Des rapaces fondirent sur les cadavres, mais Abram les chassa.
12
Au coucher du soleil, une torpeur saisit Abram. Voici qu'une terreur et une
épaisse ténèbre tombèrent sur lui.
13
Il dit à Abram: «Sache bien que ta descendance résidera dans un pays qu'elle ne
possédera pas. On en fera des esclaves, qu'on opprimera pendant quatre cents
ans.
14
Je serai juge aussi de la nation qu'ils serviront, ils sortiront alors avec de
grands biens.
15
Toi, en paix, tu rejoindras tes pères et tu seras enseveli après une heureuse
vieillesse.
16
À la quatrième génération, ta descendance reviendra ici car l'iniquité de
l'Amorite n'a pas atteint son comble.»
17
Le soleil se coucha, et dans l'obscurité voici qu'un four fumant et une torche
de feu passèrent entre les morceaux.
18
En ce jour, le SEIGNEUR conclut une alliance avec Abram en ces termes: «C'est à
ta descendance que je donne ce pays, du fleuve d'Égypte au grand fleuve, le
fleuve Euphrate -
19
les Qénites, les Qenizzites, les Qadmonites,
20
les Hittites, les Perizzites, les Refaïtes,
21
les Amorites, les Cananéens, les Guirgashites et les Jébusites.
Méditation :
1. sur la terre
promise
Une lecture simplement géographique de ce texte nous
amène à repérer que la définition de la terre promise est pour le moins une
définition complexe. Simplement le lieu où Abram se tient, c’est le premier
lieu, le lieu où il est, une notion simple, là où mon regard porte, là où
paissent mes troupeaux.
Mais la définition de cette terre peut être aussi une
définition beaucoup plus large, politique en quelque manière, puisque, dans la
fin de l’extrait, cette terre englobe tout le Proche Orient plus au moins la
Basse Egypte.
Et il se trouve des gens aujourd’hui encore en Israël
pour réclamer un extension de l’Etat – au titre de la Bible – qui corresponde à
cette vision politique mais aussi religieuse. Le Seigneur me l’a donné, c’est à
moi, c’est chez moi. Affirmation qui ouvre toutes grandes les portes de la
répression, de l’exclusion, voire de l’extermination.
2. la terre promise,
est-ce chez moi ?
Le problème d’une terre promise ainsi envisagée c’est que
ça ne laisse guère de place à autrui, ni d’ailleurs à aucune promesse. La terre
promise est, si l’on veut bien l’entendre, la terre toujours promise, ou la
terre de la promesse. Ce que le texte – complexe – que nous méditons énonce
ainsi : « Sache bien que ta descendance résidera dans un pays qu'elle ne possédera
pas. »
[יָדֹ֙עַ תֵּדַ֜ע כִּי־גֵ֣ר יִהְיֶ֣ה זַרְעֲךָ֗ בְּאֶ֙רֶץ֙
לֹ֣א לָהֶ֔ם]
Immédiatement après on
vous évoque l’Egypte puis l’Exode… mais c’est déjà une interprétation. Sache et
sache bien que ta descendance sera [גֵ֣ר] étrangère – ou convertie –
ou nouvelle venue – ou habitant temporairement – ou n’ayant pas de droits – dans
une terre (qui n’est) pas la sienne, ni maintenant, ni jamais.
Ce qui a pour conséquence
que si je suis – politiquement – religieusement – juridiquement – chez moi, sur
ma terre promise, cette terre promise et par là la promesse elle-même qui me
concerne doit aussi concerner ceux qui passent, ou qui sont différents. Le chez
moi de la terre promise ne peut être terre de la promesse que s’il est aussi un
chez toi.
3. la manière de se tenir
Ce qui caractérise donc
l’habitant de la terre promise c’est qu’il habite d’avantage la promesse que la
terre.
Ça n’est pas vrai seulement en judaïsme, ces
choses-là, aussi loin que nous sommes lourdement héritiers de cette promesse. Devenir
chrétien ainsi n’est pas défendre un territoire ni une doctrine, mais faire entendre
la promesse, et la donner à vivre.
Ainsi j’envisage l’Eglise comme terre promise des
chrétiens, terre d’accueil. Je n’en suis pas propriétaire. Ainsi je considère
l’Ecriture Sainte comme terre promise. Je n’en suis ni propriétaire, ni
dispensateur, ni défenseur.
Je n’y suis chez moi que pour autant que je
travaille à l’accueil de celui qui ne fait que passer, à l’accueil de celui que
je ne connais pas, qui est différent…
Tout le reste est de trop.