jeudi 28 juillet 2016

Père Jacques Hamel.

Père Jacques Hamel, assassiné le 26 juillet 2016
Requiescat in pace
Les ministres des cultes, pasteurs, prêtres, rabbins, imams, popes, sont des cibles... Et puisque dans la tradition de l'Eglise protestante unie de France, il arrive qu'officient de plein droit des gens qui ne sont pas ministres, ces gens-là aussi sont des cibles. Les assaillants potentiels ne disposent pas de l'intelligence nécessaire pour faire la différence entre les uns et les autres.

Je voudrais avoir une pensée fraternelle pour toutes celles et tous ceux qui vont officier, maintenant que la menace est devenue parfaitement évidente.

Lorsque les assassins entreront dans le Temple, lorsque nous aurons à marcher dans la vallée de l'ombre de la mort, que ferons-nous, comment réagirons-nous ? Nul ne le sait. Mais chacun peut relire le Psaume 23.

Notre seule force de résistance est de continuer à officier publiquement, ouvertement, profondément... et de persister à aller au culte, aujourd'hui plus que jamais !

La bêtise, la violence, le meurtre, ne pourront jamais l'emporter sur l'Evangile. Christ est ressuscité, il est vivant pour les siècles des siècles.

Et puis, parce qu'il faut continuer à faire ce que nous avons à faire... méditons :

2 Samuel 24
1 La colère du SEIGNEUR s'enflamma encore contre les Israélites, et il excita David contre eux en disant: «Va, dénombre Israël et Juda.»
Ce que David fit faire. Son chef des armées, Joab, avait bien quelques doutes…Mais David était roi et il avait du personnel pour le satisfaire. Or, quand ce fut fait… 10 David sentit son coeur battre après qu'il eut ainsi dénombré le peuple. David dit au SEIGNEUR: «C'est un grave péché que j'ai commis. Mais maintenant, SEIGNEUR, daigne passer sur la faute de ton serviteur, car j'ai agi vraiment comme un fou.»
11 Quand David se leva le lendemain matin, la parole du SEIGNEUR avait été adressée au prophète Gad, le voyant de David, en ces termes:
12 «Va dire à David: Ainsi parle le SEIGNEUR: Je fais peser sur toi trois menaces. Choisis l'une d'elles et je l'exécuterai.»

Et parmi ces menaces, David choisit trois jours de peste…

15 Le SEIGNEUR envoya donc la peste en Israël depuis ce matin-là jusqu'au temps fixé, et il mourut, parmi le peuple, de Dan à Béer-Shéva, soixante-dix mille hommes.
 16 L'ange étendit la main vers Jérusalem pour la détruire, mais le SEIGNEUR renonça à sévir et dit à l'ange qui exterminait le peuple: «Assez! Maintenant, relâche ton bras.» Or l'ange du SEIGNEUR était auprès de l'aire d'Arauna le Jébusite.
 17 David parla au SEIGNEUR, quand il vit l'ange qui frappait dans le peuple. Il dit: «C'est moi qui ai péché et c'est moi qui ai commis une faute, mais ces brebis, qu'ont-elles fait? Que ta main soit sur moi et sur ma famille!»
 18 Gad alla trouver David, en ce jour-là, et il lui dit: «Monte ériger un autel au SEIGNEUR sur l'aire d'Arauna le Jébusite.»
 19 David monta comme l'avait dit Gad, selon l'ordre du SEIGNEUR.
 20 Arauna regarda et vit le roi et ses serviteurs qui s'avançaient vers lui. Arauna sortit et se prosterna devant le roi, la face contre terre.
 21 Arauna dit: «Pourquoi mon seigneur le roi vient-il chez son serviteur?» David répondit: «Pour t'acheter l'aire, afin d'y bâtir un autel au SEIGNEUR. Ainsi le fléau sera retenu loin du peuple.»
 22 Arauna dit à David: «Que mon seigneur le roi prenne ce qui lui plaît pour offrir l'holocauste. Tu vois, les boeufs fourniront l'holocauste, le traîneau et l'attelage des boeufs fourniront le bois.»
 23 Tout cela, le roi Arauna le donna au roi. Arauna dit au roi: «Que le SEIGNEUR, ton Dieu, veuille t'agréer!»
 24 Mais le roi dit à Arauna: «Non, je tiens à te l'acheter pour son prix, et je ne veux pas offrir au SEIGNEUR, mon Dieu, des holocaustes qui ne coûtent rien.» David acheta donc l'aire et les boeufs pour cinquante sicles d'argent.
 25 Là, David bâtit un autel au SEIGNEUR et il offrit des holocaustes et des sacrifices de paix. Le SEIGNEUR se montra propice au pays, et le fléau fut retenu loin d'Israël.
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Le battage des céréales est l’opération par laquelle on sépare le grain de l’appareil végétal qui l’a porté. Cette opération se faisait très anciennement à l’aide d’un fléau. Et l’on achevait l’opération en projetant en l’air, un jour de vent, les produits obtenus. Le grain, plus dense que la paille broyée, retombait à peu près sur place, alors que les débris de paille étaient entraînés plus loin par le vent. Les aires de battage étaient donc souvent situées sur des lieux élevés.
L’archéologie nous a enseigné que ces aires étaient des lieux très sacrés, faisant l’objet de toutes sortes d’interdits et de toutes sortes de dévotions. La présence sur ces aires de ce qui est à la fois nourriture et semence, de ce qui est fruit du travail et de la chance aussi, de ce qui est donc précieux entre tout pour la survie du groupe a dû être la raison de cette sacralisation. On évitait d’y répandre du sang ; les femmes, avec l’insondable mystère qu’elles portent, n’y étaient pas les bienvenues ; et les étrangers, nécessairement impurs, pas d’avantage que les femmes. Un peuple qui perdait son aire de battage était un peuple condamné… peut-être pas condamné à disparaître, mais au moins condamné à une condition subalterne, de domestique, voire d’esclave.
On peut imaginer qu’une épidémie qui ravagea un temps la très ancienne Palestine avait épargné, on ne sait évidemment pas pourquoi, le peuple appelé « Jébusites », peuple qui semble avoir été celui qui, le premier peuplait les collines élevées de Judée là où, un jour on érigerait Jérusalem et son Temple. Leur aire de battage, lieu de ce miracle, n’en fut que plus sacrée, plus réputée, voire plus enviée par d’autres peuples. Les Jébusites ont perdu un jour leur aire de battage, ce sont les « Israélites » qui s’en sont emparé et qui ont, comme il se doit, installé là leur propre Dieu et leur propre culte. Les chrétiens n’ont pas fait autre chose lorsqu’ils ont installé leurs première Eglises sur d’anciennes sources sacrées, ou lorsqu’ils ont sculpté des croix au sommet d’antiques menhirs…
Avec le chapitre 24 du second livre de Samuel, nous avons sous les yeux un possible substrat très ancien de ce qui est l’une des légendes de la fondation de Jérusalem. La manière dont les Israélites sont devenus propriétaires du lieu n’a pas dû avoir la courtoisie que lui donne la rédaction finale du texte.
Cela évidemment ne disqualifie pas le reste de l’histoire qui nous est ici comptée…

La dernière étude biblique de la série « Dieu punit-il ? » portait sur ce chapitre, un chapitre difficile.

Dieu, pour pouvoir punir son peuple contre lequel il est en colère, conduit David à pécher. Nous avons un Dieu étrange, scandaleux, qui punit collectivement donc indistinctement, et substitutivement.
Autre point difficile dans ce texte, l’épidémie ayant cessé aussi subitement qu’elle a commencé, épargnant un lieu précis, on construit là un édifice cultuel, et on y offre des sacrifices, tout en faisant entendre que par ces moyens, l’épidémie cessa… et que donc ce genre de moyens est propre à prévenir et à juguler toutes sortes de fléaux. Et donc les lieux de cultes doivent être construits et fréquentés afin de flatter ou d’apaiser un Dieu vindicatif, profondément injuste, et pervers. Vous savez donc ce qu’il vous reste à faire.

Pourquoi en arrive-t-on à imaginer, et à défendre des idées aussi embarrassantes sur Dieu et sur la nécessité de la religion ?
Ce genre d’idée donne un pouvoir fou à ceux qui les mettent en avant, un pouvoir fou qu’ils exercent sur ceux qui les croient et auxquels elles apportent une sorte de soulagement aliénant, tout en leur coupant toute envie de réfléchir et de combattre ;
Ce genre d’idée peut émerger dès lors qu’on se pose la question du mystère du mal et qu’on veut trouver des raisons humaines ou divines là où il n’y en a pas ; le mal frappe, puis s’éloigne, il est sans raisons, il est sans pourquoi ;
Ce genre d’idée émerge dès lors que la perspective religieuse dans laquelle on s’inscrit est une perspective égoïste qu’on peut ainsi énoncer : punis-les, ils le méritent bien, mais pas moi donc, épargne moi…

Que faire de ce texte ? En repérer les points scandaleux… Réduire ce texte à ces points scandaleux et rejeter le tout ? C’est tentant… Mais ce serait dommage.

Il y a, dans ce texte, deux moments qui viennent subvertir l’ensemble :
Premier moment, lorsque David réclame que le prix de la faute soit payé par lui, et non par le peuple ; il vient s’immiscer une notion qui s’oriente vers une individualisation de la sanction : punis moi, moi (et ma famille), mais pas eux, pas ce peuple, dit David… Et au passage, nous avons à réfléchir sur la nature de la faute de David : sa faute, est-ce d’avoir fait dénombrer son armée, comme si Dieu n’était pas en mesure, le moment venu, de susciter l’armée nécessaire ? ou la faute de David n’est-elle pas plutôt d’avoir manqué de discernement, et de ne pas avoir envoyé balader, au nom de la foi, même son propre Dieu ? En réfléchissant un peu, nous avons à nous demander si le grand péché de David n’est pas d’avoir préféré Dieu à la foi en Dieu…
Deuxième moment, lorsque David refuse que lui soit donné, que ne lui coûtent rien, le terrain et le sacrifice. Et là, justement, David choisit de répondre de la grâce par un engagement qui est totalement le sien. Et l’on suggère que la grâce certes est gratuite – autant qu’il est fortuit que l’épidémie se soit arrêtée là plutôt qu’ailleurs – mais que reconnaître et accepter authentiquement cette grâce comme grâce divine ne peut être qu’une démarche personnelle et engageante. En plus, David signale ici quel est l’usage juste des lieux de culte : lieux de mémoire, de reconnaissance et d’engagement personnels.

Et puis, il y a un troisième moment, que je ne voudrais pas laisser dans l’ombre, qui est que lorsque Dieu vous parle directement d’homme à homme, avant d’obéir bille en tête et d’exiger l’acquiescement d’un courtisan – Joab réagit comme un courtisan – mieux vaut demander le discernement d’un frère… ou d’une institution. Le discernement viendra dans cette royale affaire, mais un peu trop tard, hélas, pour ceux qui, entre temps, seront tombés sous le fléau.
Dieu punit-il ? Cet étrange et difficile chapitre vient nous interroger, profondément. Impossible de répondre oui, ou de répondre non, comme s’il s’agissait d’une généralité, d’un savoir absolu. Il avait quelque chose contre son peuple (premier verset du chapitre), nous ne savons même pas quoi.
Dieu punit-il est une question qu’on peut toujours se poser. Des réponses bibliques massivement positives existent. Des réponses bibliques massivement négatives existent aussi. Avec ce chapitre – et après avoir lu et médité quelques autres chapitres au fil de l’année – cette question simple doit s’ouvrir sur une question plus complexe : Que feras-tu, personnellement, que ferez-vous, collectivement, devant Dieu et avec Dieu, de ce que la vie vous réservera, à vous et à vos semblables, de difficile, voire de terrible ? Répondre que Dieu punit est peut-être la réponse d’un moment, lorsqu’il faut tâcher seulement survivre et ne pas totalement sombrer. Mais après, plus tard, ce moment peut et doit s’ouvrir sur une certaine espérance.

"Ils" voudraient bien que nous sombrions dans ce dans quoi "ils" ont eux-mêmes sombré. Mais savent-ils seulement qu'ils ont sombré ? La jouissance de la haine, l'épouvantable jouissance des assassins, ne laisse aucune part à un discernement. Et bien, nous ne sombrerons pas! 
Quelle espérance avons-nous ? Celle qu'on ne mésuse jamais parmi nous des lieux sacrés, des textes sacrés, des cérémonies, du nom de Dieu, de la puissance dont on dispose...
Que Dieu nous soit en aide.











dimanche 24 juillet 2016

Apprends-nous à prier ! (Luc 11,1-13)

Depuis que mon ami le Père Patrick Royannais a mis cette liste en ligne sur son blog, elle s'est encore allongée... Et pendant combien de temps encore  s'allongera-t-elle ?
•  1er janvier 2016, Afghanistan, Kaboul, 3 morts
•  1er janvier 2016, Israël, Tel Aviv, 2 morts
•  2 janvier 2016, Inde, 7 morts
•  5 janvier 2016, Nigéria, nord est, 7 morts
•  7 janvier 2016, Lybie, au moins 65 morts
•  11 janvier 2016, Irak, Bagdad et Mouqdadiyah, 32 morts
•  12 janvier 2016, Turquie, Istanbul, 10 morts
•  13 janvier 2016, Pakistan, Quetta, plusieurs morts
•  14 janvier 2016, Indonésie, Jakarta, 4 morts
•  15 janvier 2016, Somalie, Base militaire, 63 morts
•  15 janvier 2016, Burkina Faso, Ouagadougou, 30 morts
•  17 janvier 2016, Afghanistan, Djalalabad, 14 morts
•  19 janvier 2016, Pakistan, Peshawar, au moins 11 morts
•  20 janvier 2016, Pakistan, université de Charsadba, 21 morts
•  20 janvier 2016, Afghanistan, Kaboul, au moins 7 morts
•  20 janvier 2016, Somalie, Mogadiscio, au moins 19 morts
•  22 janvier 2016, Egypte, Le Caire, 9 morts
•  25 janvier 2016, Cameroun, Bodo, 29 morts
•  26 janvier 2016, Syrie, Homs, au moins 24 morts
•  27 janvier 2016, Nigéria, Chibok, au moins 13 morts
•  27 janvier 2016, Egypte, Sinaï, 4 morts
•  29 janvier 2016, Arabie Saoudite, Al-Ahsa, 4 morts
•  29 janvier 2016, Nigéria, Gombi, 10 morts
•  31 janvier 2016, Syrie, sud de Damas, au moins 70 morts
•  31 janvier 2016, Tchad, région des Grands Lacs, 3 morts
•  2 février 2016, Somalie, 1 mort
•  6 février 2016, Pakistan, Quetta, 9 morts
•  9 février 2016, Syrie, Damas, 9 morts
•  9 février 2016, Nigéria, camp de Dikwa, 58 morts
•  12 février 2016, Mali, Kidal et Tombouctou, 6 morts
•  19 février 2016, Cameroun, Mémé, au moins 20 morts
•  21 février 2016, Syrie, Damas et Homs, plus de 150 morts
•  27 février 2016, Afghanistan, Asadabad et Kaboul, 25 morts
•  29 février 2016, Somalie, Baidoa, 30 morts
•  29 février 2016, Irak, Bagdad, au moins 40 morts
•  4 mars 2016, Yémen, Aden, au moins 16 morts
•  6 mars 2016, Irak, sud de Bagdad, au moins 47 morts
•  7 mars 2016, Tunisie, Ben Guerdane, 18 morts
•  13 mars 2016, Côte d’Ivoire, Grand Bassam, 18 morts
•  16 mars 2016, Nigéria, Maiduguri, 25 morts
•  19 mars 2016, Turquie, Istanbul, 4 morts
•  22 mars 2016, Belgique, Bruxelles, 35 morts
•  25 mars 2016, Yémen, Aden, au moins 22 morts
•  25 mars 2016, Irak, au sud de Bagdad, au moins 30 morts
•  27 mars 2016, Pakistan, Lahore, 72 morts
•  2 avril 2016, Arabie Saoudite, Ryad, 1 mort
•  19 avril 2016, Afghanistan, Kaboul, 64 morts
•  7 juin 2016, Turquie, Istanbul, 11 morts
•  9 juin 2016, Israël, Tel-Aviv, 4 morts
•  12 juin 2016, Etats-Unis, Orlando, 49 morts
•  13 juin 2016, France, Magnanville, 2 morts
•  27 juin 2016, Liban, frontière est, 5 morts
•  28 juin 2016, Turquie, Istanbul, 45 morts
•  30 juin 2016, Cameroun, Djakan, une dizaine de morts
•  2 juillet 2016, Bangladesh, Dacca, au moins 20 morts
•  3 juillet 2016, Irak, Bagdad, 292 morts (certains disent 1000)
•  4 juillet 2016, Arabie Saoudite, Médine, 4 morts
•  5 juillet 2016, Syrie, Hassaké, au moins 16 morts
•  14 juillet 2016, France, Nice, 84 morts

La liste n’est peut-être pas exhaustive. Il s’agit des attentats menés par des islamistes depuis le début 2016. Le nombre de morts est approximatif ; des blessés peuvent décéder après le décompte. Ne sont a priori pas comptés les terroristes décédés. Il faut ajouter des dizaines de centaines de blessés.
Luc 11
1 Il était un jour quelque part en train de prier. Lorsqu’il s’interrompit, un de ses disciples lui dit: «Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean l'a appris à ses disciples.»

2 Il leur dit: «Quand vous priez, dites: Père, puisse ton nom être sanctifié, puisse ton règne venir,
3 notre pain le plus essentiel, donne-le nous un jour après l’autre,
4 remets-nous nos péchés, tout comme nous aussi nous remettons (leurs dettes) à ceux qui sont nos obligés, et ne nous mène pas au cœur de la tentation.»

5 Jésus leur dit encore: «Si l'un de vous a un ami et qu'il aille le trouver au milieu de la nuit pour lui dire: ‹Mon ami, j’ai besoin de trois pains, 6 parce qu'un de mes amis m'est arrivé de voyage et je n'ai rien à mettre devant lui›, 7 et si l'autre, de l'intérieur, lui répond: ‹Ne m'ennuie pas! Maintenant la porte est fermée; mes enfants et moi nous sommes couchés; je ne puis me lever pour te donner du pain›, 8 je vous le déclare: même s'il ne se lève pas pour lui en donner parce qu'il est son ami, eh bien, parce que l'autre est impudent, il se lèvera pour lui donner ce dont il a besoin.
9 «Quant à moi je vous dis: Demandez, on vous donnera; cherchez, vous trouverez; frappez, on vous ouvrira.
10 En effet, quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, et à qui frappe on ouvrira.
11 Quel père parmi vous, si son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu de poisson? 12 Ou encore s'il demande un œuf, lui donnera-t-il un scorpion?

13 Si donc vous, qui êtes mauvais, savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père céleste donnera-t-il l'Esprit Saint à ceux qui le lui demandent.»

Prédication : 
« Apprends-nous à prier, comme Jean l’a appris à ses disciples », la demande fut faite un jour à Jésus.
            La forme de cette demande nous signale que les groupes religieux de ce temps-là se distinguaient les uns des autres par la forme de leurs prières, par le style de leur piété. Nous n’avons pas à nous étonner de cela… ça n’a pas changé depuis : les groupes religieux se distinguent encore aujourd’hui les uns des autres par la forme de leurs prières et par le style de leur piété… Ils se distinguent ainsi, même s’ils semblent s’adresser tous au même Dieu. C’est sur le fond de cette soi-disant unicité de Dieu que l’un de mes amis avait un jour publiquement énoncé que « si nous avions tous le même Dieu, nous prierions tous de la même manière ». Cette affirmation un peu provocante avait pour but d’inviter un auditoire très diversifié à s’interroger non seulement sur la forme des prières, mais aussi sur les liens parfois obscurs qui existent, dans le cœur de ceux qui prient, entre la forme de leurs prières, l’identité qu’ils se donnent, et les dispositions profondes de leurs cœurs.
Nous ne savons pas quelles furent les prières spécifiques que Jean (le Baptiste) enseigna à ses adeptes. Mais ce qui est clair avec le texte que nous lisons, c’est que même si la demande initiale adressée à Jésus a pour objet une prière qui serait spécifique à ses propres disciples, Jésus ne s’est pas contenté d’une prière de plus, qui aurait permis à ses disciples de se reconnaître entre eux et de se distinguer des « autres ». Jésus ne va pas leur apprendre une prière seulement, il va aussi leur apprendre à prier.
D’ailleurs, disons-le tout de suite, si une prière, quelle qu’elle soit, a pour un groupe l’unique fonction d’être un marqueur inamovible, une identité, une spécificité absolue… elle est sans aucune portée, parce qu’elle se donne formellement comme plus importante que Dieu lui-même.
Pour aller plus loin encore, mais dans un sens positif, une prière à Dieu, que ce soit une prière d’action de grâce, de louange, ou de demande – et ici nous avons une prière de demande – une prière à Dieu ne peut avoir pour destinataire que Dieu seul, aura pour objet ce qui ne peut être accompli que par Dieu seul, et sera formulée par des gens qui ne comptent que sur Dieu seul.

Avec ceci, et devant le texte que nous venons de lire, nous avons trois questions à nous poser : 1. Est-ce que la prière que Jésus propose à ses disciples satisfait aux trois critères que nous venons d’énoncer ? ; 2. Est-ce que l’enseignement que Jésus donne avec cette prière est de nature à orienter valablement ceux qui prient ? ; 3. Est-il possible que quelqu’un ait un jour prié, ou prie un jour, authentiquement, cette prière ?

Nous nous demandons d’abord si la prière que Jésus propose à ses disciples est bien une prière à Dieu.
En la relisant, nous verrons aisément qu’elle a effectivement Dieu pour seul destinataire… et que Dieu seul peut l’exaucer. En effet (en reprenant point par point) :
Même si les humains peuvent révérer le nom de Dieu, respecter le nom de Dieu en ne le prononçant jamais, en s’efforçant s’ils le prononcent que ce ne soit pas en vain, pour n’importe quelle raison, même s’ils peuvent agir au nom de Dieu, Dieu seul, parce qu’il est Dieu, peut sanctifier son propre nom.
Même si les humains peuvent tenter d’agir pour plus de justice, et peuvent tenter de lutter contre le mal et contre les effets du mal, Dieu seul peut faire advenir son règne.
Même si les humains peuvent partager leurs richesses, le pain et la parole qui édifie et qui console, Dieu seul sait ce qui est essentiel ; et cet essentiel, Lui seul peut le donner, et cela ne peut être reçu que de Lui, un jour après l’autre, comme la vie.
Les humains peuvent effectivement délier de leurs dettes ceux de leurs semblables qui sont leurs obligés, et ce faisant les considérer  comme frères, comme égaux, et non pas comme inférieurs ; mais la justification du pécheur n’appartient qu’à Dieu seul : Dieu seul peut remettre aux humains leurs péchés.
Il est important que ceux qui croient en Dieu restent toujours serviteurs de Dieu. La tentation, la tentation par excellence, c’est pour les croyants de s’imaginer que Dieu est leur serviteur ; c’est imaginer que Dieu leur doit quelque chose parce qu’ils ont convenablement prié, ou parce que c’est écrit dans la Bible. La tentation est là, toujours, qui menace la foi. Et bien Dieu seul peut guider les chemins de ceux qui croient, les éclairer, les redresser, et faire en sorte qu’en dépit des faiblesses des croyants, ceux-ci ne soient pas conduits au cœur de la tentation, là où ils ne peuvent que céder…
Dieu seul est donc bien formellement l’unique  destinataire de la prière que Jésus propose à ses disciples, et Lui seul est en mesure de l’exaucer.
Formellement, tout va bien. Mais on ne peut pas se contenter du formalisme. Jésus ne donne pas seulement à ses disciples une prière particulière. Il leur donne aussi un enseignement, parce que toute prière particulière, même formellement parfaite, peut être salie, voire trahie, par l’utilisation qui en est faite.
Dans quel état d’esprit prie-t-on ? Et que va-t-on recevoir, reconnaître, accepter, ou pas… comme exaucement de cette prière ?
La petite parabole que Jésus raconte à cette occasion a pour but de faire réfléchir sur les conditions de la demande et sur l’exaucement de la prière. Un impudent vient clamer en pleine nuit qu’il a sans délai besoin de trois pains. Certes l’hospitalité est sacrée en Orient. Et elle a une dimension collective, parce qu’elle est sacrée. Mais cela ne peut justifier l’imprévoyance, et moins encore l’impudence. Un engagement individuel conséquent est exigible. Même si, finalement, quelqu’un se lève pour donner ces trois pains, l’impudent a failli. Et ce n’est pas de trois pains seulement dont il a besoin ; rien dans la parabole ne signale qu’il va recevoir ces trois pains, ou pas, ou tout autre chose. Il recevra ce dont il a besoin. C’est que Dieu n’est pas un domestique qu’on sonne lorsqu’une envie nous prend. Dieu exauce, il n’en faut pas douter. Mais il est Dieu et, lorsqu’on prie, c’est à Lui qu’il faut s’en remettre. Comment et quand exaucera-t-il ?
A quiconque demande à Dieu, il sera donné. Mais peut-être pas ce qui était demandé, peut-être tout autre chose. Mais reste à savoir si celui qui demande reconnaîtra ensuite ce qu’il aura reçu comme un don de Dieu.
Ainsi aussi quiconque cherche vraiment, dans la Bible, dans la prière et dans la foi, non pas exige confirmation de ce qu’il prétend savoir… quiconque cherche vraiment et s’adresse à Dieu, trouvera. Mais reste à savoir s’il reconnaîtra comme réponse de Dieu ce qu’il aura trouvé.
Quant à celui qui frappe à une porte qu’il ne peut ouvrir lui-même, elle lui sera ouverte. Mais il ne sait pas quel chemin aura été dessiné par Dieu pour lui derrière cette porte. Et reste donc à savoir s’il franchira cette porte et prendra ce chemin.

En plus de la prière qu’il recommande, Jésus donne tout cet enseignement. Et cet enseignement invite ceux qui prient à bien disposer leurs cœurs, de sorte que leur prière soit bien une prière adressée à Dieu, et de sorte qu’ils reconnaissent comme exaucement de leur prière tout ce qui adviendra.
 Mais ceux qui prient – nous autres qui prions – peuvent-ils disposer ainsi leurs cœurs ? Peuvent-ils, sans l’aide de Dieu, aller jusqu’au bout d’un travail de purification de soi, de mise à disposition de soi et d’ouverture ? Demander à Dieu qu’il donne l’Esprit Saint c’est reconnaître que, sans l’aide de Dieu, nous ne pouvons pas, par nos propres forces, faire que notre prière soit une prière purement adressée à Dieu et reconnue comme exaucée par Lui. Prier comme Jésus l’enseigne, cela exige une transformation de nos personnes. Nous pouvons certes travailler à cette transformation, par notre méditation, par notre engagement, par notre effort d’ouverture. Mais il nous faut aussi laisser cette transformation advenir en nous.
Que recevrons-nous ? Où cela nous mènera-t-il ? Les disciples ne savaient pas où cela les mènerait. Lorsqu’effectivement ils ont reçu l’Esprit Saint, ils ont dit ce qu’ils n’avaient jamais pensé dire, fait ce qu’ils n’avaient jamais pensé faire… Et vécu comme jamais ils n’avaient pensé vivre.
Nous aspirons à être disciples du Christ. Alors, demandons par-dessus tout à Dieu qu’il nous donne l’Esprit Saint. Et laissons-nous transformer par Lui. Amen

dimanche 17 juillet 2016

Choisir la bonne part (Luc 10,38-42)

Luc 10
38 Comme ils étaient en route, il entra dans un village et une femme du nom de Marthe le reçut dans sa maison.
39 Elle avait une sœur nommée Marie qui, s'étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
40 Marthe s'affairait à un service compliqué. Elle survint et dit: «Seigneur, cela ne te fait rien que ma sœur m'ait laissée seule à faire le service? Dis-lui donc de m'aider.»
Et soudain, Marthe...
41 Le Seigneur lui répondit: «Marthe, Marthe, tu t'inquiètes et t'agites pour bien des choses.

42 Une seule est nécessaire. C'est bien Marie qui a choisi la bonne part; elle ne lui sera pas enlevée.»

Preek:
Het is gemakkelijk voor te stellen hoe het was in dat huis. Maria is heel oplettend bij de lessen van Jezus, terwijl haar zuster Martha heel zorgzaam is met opdienen, koken, wassen; ze loopt voortdurend heen en weer van de keuken naar de eetkamer, of naar de kamer waar les gegeven wordt...

We zien dat Martha en Maria beiden nauw betrokken zijn bij wat ze doen. En we zien ook dat wat ze doen, zeer serieus gedaan wordt, vanwege de aanwezigheid van hun gast. Die is,  zoals ze weten, een briljante, belangrijke en wonderbaarlijke prediker, en die is, wat wij weten als christenen, als lezers van het evangelie van Lucas, de Zoon van God ...

Denkt u er eens over na hoe u hem zou ontvangen, als het eens zou gebeuren dat hij uw gast is? U zult het zeker niet nalaten om voor hem een diner klaar te maken, en u zult zeker ook niet verzuimen om aandachtig naar hem te luisteren. Maar welke van deze dingen is het juiste? Nou? Zijn ze niet allebei nodig?

Zelfs als ze beide nodig zijn, zegt Jezus dat maar één ding nodig is. En, welke dan? We moeten daarvoor niet alleen zoeken in de keuken en de kamer waar les gegeven wordt. Het moet diepgaander zijn. En misschien is die diepgang te vinden in het verschil in gedrag tussen deze twee vrouwen. Beide gaan volledig op in wat ze doen, maar Martha is de enige die scherpe kritiek uit. Zij is de enige die zich beklaagt; zij vindt dat de ander precies hetzelfde moet doen als zijzelf doet.

En hier hebben we een aanwijzing, misschien niet van wat goed is om te doen, maar van wat de keuze van het goede doen met zich meebrengt. De keuze van het goede doen vraagt het vermogen om te kiezen om daar helemaal voor te gaan, en het vermogen persoonlijk verantwoordelijk te zijn voor wat we gekozen hebben om te doen. En op deze manier kan het goede doen niet terecht gewezen worden.

Zo kan men het goede doen door te kiezen om in de keuken te blijven, door te kiezen om te bedienen - maar dat is niet wat Martha deed. En men kan kiezen het goede te doen door in de kamer te blijven waar les wordt gegeven, en dat is wat Maria deed - zonder iemand iets te verwijten, en op zich te nemen daar te zijn waar ze als vrouw niet geacht werd te zijn.

Het goede kiezen, dat betekent voor Jezus kiezen, ofwel voor het Evangelie kiezen, is dus een persoonlijke en verantwoordelijkheid met zich meebrengende keuze. Dit is de keuze die Jezus heeft gemaakt gedurende zijn hele leven. We weten hoe het begon. En we weten wat er gebeurd is aan het einde. Maar het goede doen, heeft hem nooit tegen gehouden: hij is opgestaan ​​uit de dood!

Maria laat zien dat mensen in staat zijn te kiezen om het goede te doen. Laten wij dat ook doen. En dat God ons daarbij helpt. Amen.



Prédication :
            Il est très facile d’imaginer comment c’était dans cette maison. Marie est profondément attentive à l’enseignement de Jésus, pendant que Marthe, sa sœur, est profondément soucieuse de servir, de cuisiner, de laver ; elle est constamment en mouvement de la cuisine à la salle à manger, ou à la salle de classe…
            Considérons que Marthe et Marie sont toutes deux profondément impliquées dans ce qu’elles sont en train de faire. Et considérons que ce que chacune fait est fait très sérieusement, à cause de la présence de leur invité, qui est, pour ce qu’elles savent, un prédicateur brillant, important et miraculeux, et qui est pour ce que nous savons en tant que chrétiens, en tant que lecteurs de l’évangile de Luc, le Fils de Dieu…
            Demandez-vous, s’il arrivait qu’il soit votre invité, comment vous l’accueilleriez? Vous ne manqueriez certainement pas de lui préparer un dîner, et vous ne manqueriez certainement pas non plus de l’écouter attentivement. Mais considéreriez-vous qu’une seule de ces choses est la bonne part? Et bien ? Est-ce que les deux ne sont pas requises ?

            Même si les deux sont requises, Jésus dit qu’une seule chose est requise. Alors, laquelle ? Nous ne devons pas chercher cette chose seulement quelque part entre la cuisine et la salle de classe. Cela doit être plus profond. Et peut-être que cette chose plus profonde est à trouver dans la différence de comportement entre ces deux femmes. Elles sont toutes deux totalement impliquées dans ce qu’elles font, mais Marthe est la seule à récriminer. Elle est la seule à se plaindre ; elle seule considère que l’autre devrait agir exactement comme elle agit elle-même.
            Et nous avons ici une indication, peut-être pas de ce qu’est la bonne part, mais de ce que le choix de la bonne part apporte. Le choix de la bonne part apporte la capacité de choisir ce qu’on va faire, et la capacité d’être personnellement responsable de ce qu’on a choisi de faire. Et c’est de cette manière que la bonne part ne peut jamais être reprise.

            Ainsi, on peut choisir la bonne part en choisissant de rester dans la cuisine, en choisissant de servir, mais ce n’est pas ce que Marthe a fait. Et on peut choisir la bonne part en choisissant de rester dans la salle d’étude, et c’est ce que Marie a fait, sans faire de reproches à personne, et en assumant d’être là où en tant que femme elle n’était pas censée être.

Choisir la bonne part, ce qui signifie choisir Jésus, ou encore choisir l’Evangile, c’est ainsi un choix personnel et responsable. C’est le choix que Jésus a fait, pendant toute sa vie. Nous savons comme cela commence. Et nous savons ce qui se passa à la fin. Mais la bonne part ne lui fut jamais retirée : il est ressuscité des morts !

            Marie est un exemple que les humains sont capable de choisir la bonne part. Alors choisissons-la. Et que Dieu nous soit en aide. Amen


dimanche 10 juillet 2016

Ce qui est écrit, et comment on le lit (Luc 10,25-37)

A mes lecteurs et lectrices, je veux signaler que ce dimanche, et dimanche prochain aussi, les prédications seront tout à la fois brèves et bilingues (français et néerlandais). Cela tient à ce qu'un effort est fait ici pour l'accueil en été de néerlandophones... Et comme les cultes sont aussi célébrés en deux langues - voire trois, l'anglais pouvant s'ajouter si nécessaire - le choix a été fait, pour la prédication, de formats courts.
Mais je ne suis pas néerlandophone - la traduction n'est pas de moi. J'ai grande confiance dans mes traducteurs. J'ajoute que, si besoin était, je pourrais communiquer ce sermon en langue anglaise... mon petit anglais me permet quelque chose d'intelligible, je crois.
Luc 10
25 Et voici qu'un légiste se leva et lui dit, pour le mettre à l'épreuve: «Maître, que dois-je faire pour recevoir en partage la vie éternelle?»
26 Jésus lui dit: «Dans la Loi qu'est-il écrit? Comment lis-tu?»
27 Il lui répondit: «Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ta pensée, et ton prochain comme toi-même.»
28 Jésus lui dit: «Tu as bien répondu. Fais cela et tu auras la vie.»
29 Mais lui, voulant montrer sa justice, dit à Jésus: «Et qui est mon prochain?»
30 Jésus reprit: «Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, il tomba sur des bandits qui, l'ayant dépouillé et roué de coups, s'en allèrent, le laissant à moitié mort.
31 Il se trouva qu'un prêtre descendait par ce chemin; il vit l'homme et passa à bonne distance.
32 Un lévite de même arriva en ce lieu; il vit l'homme et passa à bonne distance.
33 Mais un Samaritain qui était en voyage arriva près de l'homme: il le vit et fut pris de pitié.
34 Il s'approcha, banda ses plaies en y versant de l'huile et du vin, le chargea sur sa propre monture, le conduisit à une auberge et prit soin de lui.
35 Le lendemain, tirant deux pièces d'argent, il les donna à l'aubergiste et lui dit: ‹Prends soin de lui, et si tu dépenses quelque chose de plus, c'est moi qui te le rembourserai quand je repasserai.›
36 Lequel des trois, à ton avis, s'est montré le prochain de l'homme qui était tombé sur les bandits?»

37 Le légiste répondit: «C'est celui qui a fait preuve de bonté envers lui.» Jésus lui dit: «Va et, toi aussi, fais de même.»
Prédication
            Il doit y avoir ici l’un des plus importants versets de la Bible. En fait, deux versets de la Bible sont ensemble pour moi le plus important verset de la Bible. L’autre est dans le livre du Lévitique (20,8) : « Vous garderez mes lois, et vous les mettrez en pratique. Cela fait deux verbes, pour deux actions différentes, mais pour une seule sanctification.
            Ici, avec Luc, ces deux verbes deviennent deux questions : qu’est-il écrit dans la loi ? Quelle lecture en donnes-tu ? Et la signification de la seconde question est clairement : quel est ton comportement ? quels sont tes actes ? que fais-tu en te justifiant par ta connaissance des Ecritures ? et que fais-tu en accord avec ta propre lecture de la Bible et de quoi tu attendes de recevoir un certain profit de la part de Dieu lui-même ?

            Nous connaissons tous l’histoire de ces quatre hommes, l’un étant presque mort, deux étant supposé être des gens très saints et très importants, le troisième étant un Samaritain. A Jérusalem, on avait l’habitude de haïr les Samaritains, pour d’obscures et stupides raisons de pureté raciale… mais nous savons que les Samaritains étaient des lecteurs de la Torah, tout comme les Juifs ; et qu’ils étaient aussi des adorateurs de Dieu, tout comme les Juifs. Et c’est pourquoi cette parabole pouvait être choquante pour le légiste qui était là pour mettre Jésus à l’épreuve.
            Regarde, dit Jésus, ce qu’un Samaritain fait, sans se justifier en aucune manière ; et toi, peut-être pas toi mais tes frères en connaissance sacrée et en en observance, que ferais-tu ? Choisirais-tu ta pureté rituelle, ou la vie d’un homme ? Il ne devrait y avoir qu’une seule réponse possible. Mais, malheureusement, il y en a deux. Choisir la vie d’un homme sans espérer rien d’autre que cette vie devrait être cette seule réponse, selon l’évangile et la seule volonté de Dieu. Mais combien de fois les humains choisissent-ils plus ou moins l’autre réponse ? Plus ou moins c’est toujours trop lorsqu’il s’agit en fait de mépris et d’autojustification.

            Alors, demande Jésus, qui a été le prochain de la victime ? Le Samaritain. And de qui serais tu, toi, le prochain ?
            C’est une question que Jésus nous pose. Et c’est aussi une réponse qu’il donne au Légiste – et peut-être à nous aussi. Lorsque tu es un tel prochain, comme le Samaritain le fut, sans aucune raison et sans attendre aucune sorte de récompense, tu as la vie éternelle, non pas à cause de ton acte. Mais parce qu’agir de cette manière n’est rien de moins que la vie éternelle.

            Puissions-nous tous vivre ainsi. Et que Dieu nous soit en aide. Amen
Preek
            Het betreft hier een van de belangrijkste verzen uit de Bijbel. In feite zijn er twee verzen van de Bijbel samen voor mij het belangrijkste in de Bijbel. De andere is Leviticus 20 vers 8: ' Wees dus gehoorzaam aan mijn wetten en ga daarnaar te werk’. Dit zijn twee werkwoorden, voor twee verschillende acties, maar voor een enkele heiliging.

            Hier, met Lucas, worden deze twee werkwoorden twee vragen: Wat staat er in de wet? Wat leest u? En de zin van de tweede vraag is duidelijk: wat doet u er mee? Wat zijn uw acties? Wat doet u als rechtvaardiging van uw kennis van de Schrift? En wat doet u op basis van wat u zelf leest in de Bijbel, en verwacht u beloond te worden van de kant van God zelf?

            We kennen allemaal de geschiedenis van deze vier mannen, één bijna dood, twee worden verondersteld zeer vrome en belangrijke mensen te zijn, de derde is een Samaritaan. In Jeruzalem had men over het algemeen een afkeer van de Samaritanen om onduidelijke, stompzinnige regels van raszuiverheid... maar we weten ook dat de Samaritanen de Thora lazen, net als Joden; en zij vereerden God, ook net als de Joden. En dit is waarom deze gelijkenis ergerlijk kan zijn voor de wetgeleerde die daar was om Jezus op de proef te stellen.

            Kijk, zei Jezus, wat een Samaritaan deed, geheel zonder eigenbelang; en u, en misschien niet u, maar uw broeders met hun vrome kennis en levensstijl, wat zou u, wat zouden zij doen? Kiest u voor uw rituele zuiverheid, of het leven van een man? Er is maar één antwoord mogelijk. Maar, helaas, zijn er twee. Kiezen voor het leven van een man zonder meer te verwachten dan dat leven, dat is het enige antwoord volgens het evangelie en de wil van God. Maar hoe vaak kiezen mensen min of meer voor het andere antwoord? Min of meer is nog altijd te veel, want het gaat hier eigenlijk om minachting en zelfrechtvaardiging.

            En, vraagt Jezus, wie was de naaste van het slachtoffer? De Samaritaan. En van wie bent u, ben jij de naaste.

            Het is een vraag die Jezus ons stelt. En het is ook een antwoord dat hij geeft aan de wetgeleerde - en misschien ook aan ons. Wanneer u een naaste bent, net zoals de Samaritaan het was, zonder enige reden en zonder een soort van beloning te verwachten, hebt u het eeuwige leven - niet vanwege uw daden. Maar omdat uw handelen op deze manier niets minder is dan het eeuwige leven.

            Dat wij allen zo mogen leven. En dat God ons daarbij helpt. Amen

dimanche 3 juillet 2016

Être sauvé (Actes 15,1-12) et une certaine maladie de la foi

Après un attentat, ça ressemble à ça. Pâle ressemblance que celle des images. Il manque l'odeur de l'explosion et de l'incendie, celle de la chair et du sang, celle du désespoir des survivants. Il manque les cris, les appels à l'aide. L'image ne véhicule pas tout cela. L'essentiel est hors de portée de l'image, et hors de portée de l'imagination. Se taire est pourtant impensable... Pour quelle raison, pour quelle religieuse raison ?
Actes 15
1 Certaines gens descendirent alors de Judée, qui enseignaient aux frères : «Si vous ne vous faites pas circoncire selon la règle de Moïse, disaient-ils, vous ne pouvez pas être sauvés.»
2 Un conflit en résulta, et des discussions assez graves opposèrent Paul et Barnabas à ces gens. On décida que Paul, Barnabas et quelques autres monteraient à Jérusalem trouver les apôtres et les anciens à propos de ce différend.
3 L'Église d'Antioche pourvut à leur voyage. Passant par la Phénicie et la Samarie, ils y racontaient la conversion des nations païennes et procuraient ainsi une grande joie à tous les frères.
4 Arrivés à Jérusalem, ils furent accueillis par l'Église, les apôtres et les anciens, et ils les mirent au courant de tout ce que Dieu avait réalisé avec eux.
5 Des fidèles issus du pharisaïsme intervinrent alors pour soutenir qu'il fallait circoncire les païens et leur prescrire d'observer la loi de Moïse.
6 Les apôtres et les anciens se réunirent pour examiner cette affaire.
7 Comme la discussion était devenue vive, Pierre intervint pour déclarer: «Vous le savez, frères, c'est par un choix de Dieu que, dès les premiers jours et chez vous, les nations païennes ont entendu de ma bouche la parole de l'Évangile et ont cru.
8 Dieu, qui connaît les cœurs, leur a rendu témoignage, quand il leur a donné, comme à nous, l'Esprit Saint, 9 sans faire la moindre différence entre elles et nous. C'est par la foi qu'il a purifié leurs cœurs.
10 Dès lors, pourquoi mettre Dieu à l’épreuve à la nuque des disciples un joug que ni nos pères ni nous-mêmes n'avons été capables de porter?
11 Encore une fois, c'est par la grâce du Seigneur Jésus, nous le croyons, que nous avons été sauvés, exactement comme eux!»
12 Il y eut alors un silence dans toute l'assemblée…

Prédication :
Nous sommes à Antioche, aujourd’hui Antakya, ville de Turquie située sur le fleuve Oronte, non loin des côtes du fond du golfe de Chypre, autrefois capitale romaine régionale et point de départ de la route de la soie. Une ville cosmopolite, où se côtoient des gens de toutes origines et de toutes croyances, et c’est là que, pour la première fois de l’histoire connue, des gens se réclamant de Jésus de Nazareth sont appelés chrétiens. Un jour, des prédicateurs itinérants, s’adressant à ces chrétiens, proclament : « Si vous ne vous faites pas circoncire selon la règle de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés. »
Controverse théologique...
Cet enseignement provoqua une vive controverse entre ces prédicateurs et le duo Paul-Barnabas, controverse qui divisa apparemment aussi la communauté. La circoncision est l’objet de cette controverse, mais quel en est l’enjeu ? Cet enjeu peut être énoncé en deux questions : (1) De quoi faut-il être sauvé ?, (2) Avoir été circoncis est-il une condition de possibilité d’être sauvé ?
Nous répondons provisoirement à la première question : il s’agit d’être sauvé des tourments de la fin des temps et de la damnation éternelle. Réponse très provisoire dans le fil de notre méditation, mais possible en ce temps-là, vu l’effervescence apocalyptique qui accompagnait les derniers soubresauts d’un judaïsme nationaliste et guerrier…

S’agissant de ce qui est nécessaire pour pouvoir être sauvé, nous sommes de bons protestants et nous n’allons pas nous précipiter sur la réponse que nous connaissons si bien, et qui d’ailleurs figure un peu plus loin dans le texte biblique. Nous allons plutôt nous laisser interpeller par cet enseignement fait à Antioche et par les questions qu’il soulève.

Remarquez bien que, depuis le début du texte biblique, le verbe sauver n’est utilisé qu’à la voix passive : être sauvé. Ce qui signifie d’emblée – et nous devons prendre cela très au sérieux – que nul ne peut entreprendre quoi que ce soit qui pourrait constituer une possibilité d’être sauvé, ou une certitude d’être sauvé. On ne se sauve pas soi-même. Et on ne peut pas non plus posséder la certitude d’être sauvé...
Si aucune action commise par soi-même ne peut constituer une possibilité ou une certitude d’être sauvé, peut-être qu’une action commise pour soi par quelqu’un d’autre suffirait, comme par exemple se faire circoncire... Mais toute certitude par ce moyen, ou par tout autre, est déjà anéantie par le fait même que le verbe sauver est employé à la voix passive. Donc la circoncision elle-même ne sert à rien pour ce qu’il en est d’être sauvé.
La prédication de ces gens-là à Antioche se contredit bien dans ses propres termes. Et il est fort étonnant que la raison n’ait pas pu l’emporter. Il devait y avoir un enjeu passionnel autour de la circoncision, une affaire d’identité, d’image, voire de préséance, de prestige, ou un christianisme à deux vitesses. Devant le tour passionnel que prenait l’affaire, la communauté chrétienne d’Antioche, sagement, décida de prendre avis. Paul, Barnabas et quelques autres montent à Jérusalem... Et il est bien étonnant que la controverse ait rebondi à Jérusalem.

Notez que la controverse a rebondi à Jérusalem, mais pas à l’identique. Si à Antioche, il avait été enseigné que la circoncision était une condition de possibilité d’être sauvé, la question d’être sauvé disparaît à Jérusalem, et il ne demeure que la question de l’observance de la tradition juive. Circoncision et observance pour les chrétiens, oui, ou non ? Indépendamment de la question d’être sauvé, et indépendamment aussi des choix de mode de vie que chacun peut faire pour son propre compte, cela nous conduit à nous demander si l’on reconnaît un frère en Christ à ce qu’il prie comme vous-même, se nourrit et jeûne comme vous-même, s’habille comme vous-même… Sont-ce les apparences qui permettent de reconnaître le frère, le croyant ?
M'enfin, les croyants...
... comment les reconnaît-on ?
Nous allons répondre que non. A Antioche nous répondions que ce ne sont pas les actes qui font qu’on peut être sauvé. A Jérusalem nous répondons que ce ne sont pas les apparences qui permettent de reconnaître le croyant, et que la dignité de frère selon le Seigneur ne tient pas à ce que le frère – ou la sœur – soit un autre moi-même. 

C’est que Pierre rappelle parfaitement, en affirmant d’abord que pour ce qu’il en est de savoir qui est croyant ou qui ne l’est pas, c’est Dieu seul qui le sait, lui qui connaît les cœurs, et en affirmant ensuite que, s’agissant d’être sauvé, aucune œuvre humaine n’y peut rien, mais que c’est par la grâce du Seigneur Jésus qu’on a été sauvé ; non pas qu’on le sera peut-être sous telle ou telle condition, mais qu’on l’a été, depuis toujours, gratuitement, observance ou pas, mérite ou pas, Juif ou païen… Nous pouvons imaginer que Pierre rappela ces deux vérités d’une voix de tonnerre : il y eut alors un silence dans toute l’assemblée.

Mais nous n’en avons pas fini. S’agissant de ces deux vérités que nous venons de rappeler, nous n’en aurons jamais fini. Avoir été sauvé depuis toujours, parfaitement et gratuitement, est la plus embarrassante des vérités chrétiennes…Et que Dieu seul sache qui sont les siens est une vérité presque aussi embarrassante que la précédente… Toujours, les humains seront tentés de rajouter quelques conditions à la grâce, pour tromper leur embarras face à ce savoir qui n’appartient qu’à Dieu. Toujours, tant que la terre durera !

Au moment où ces événements ont lieu, il se pose à la très ancienne tradition juive – et à son tout jeune rameau chrétien aussi – une question qu’elle n’avait fait que commencer à se poser, celle de l’universalité de sa foi, de ses convictions, de son Dieu. Que tous les croyants observent toute la loi de Moïse, répond simplement à la question de l’universalité, mais cela a l’inconvénient majeur d’être totalitaire ; et cela ramène Dieu à une seule image qu’on doit imposer à tous. La réponse que fait Pierre recueille plus naturellement notre approbation, parce qu’elle a le mérite libérer chaque croyant, mais elle pourrait avoir l’inconvénient majeur de faire de chacun une sorte de mesure du tout, et de ramener ainsi Dieu à n’être finalement que le dieu particulier de chacun.
Mais si on la considère dans sa globalité, la réponse de Pierre est une réponse qui a une portée tout à la fois théologique, personnelle et communautaire. Théologique, parce qu’elle rend gloire à Dieu seul pour la grâce parfaite déjà faite à tous en Jésus Christ, grâce à laquelle il n’y a rien du tout à rajouter, ni circoncision, ni observance. Cette grâce est libératrice. Personnelle, parce que précisément chacun est appelé à accueillir cette grâce ; et en même temps qu’il l’accueille, à la prodiguer, en particulier en ne faisant pas obligation à autrui d’être semblable à lui. Pour autant, cette libération ne peut jamais constituer un alibi pour vivre n’importe comment. Communautaire, parce tous ensemble sont appelés à une réciprocité de la grâce, une réciprocité qui s’exprimera, dans la vie communautaire, par une discipline partagée modérée, et choisie.

Et ainsi, nous revenons à la première question que nous avons posée : être sauvés, oui, mais de quoi ? Nous répondons qu’il s’agit d’être sauvé de cette maladie de la foi qui consiste à mettre à l’épreuve notre Dieu et nos semblables. Dieu, en faisant comme si sa grâce n’était pas intrinsèquement suffisante. Nos semblables en voulant leur faire croire qu’il faut qu’ils ajoutent des mérites à la grâce.
Nous affirmons que recevoir la foi en cette grâce c’est être sauvé de cette maladie. Alors, la foi en cette grâce, accueillons-la, apprenons chaque jour à la recevoir et à prodiguer la grâce divine.

Que Dieu nous soit en aide. Amen