samedi 19 décembre 2020

Conçu du Saint Esprit et né de la vierge Marie (Luc 1:26-38) Quatrième culte de l'Avent 2020

 Luc 1

26 Le sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée du nom de Nazareth,  27 à une jeune fille accordée en mariage à un homme nommé Joseph, de la famille de David; cette jeune fille s'appelait Marie.  28 L'ange entra auprès d'elle et lui dit: « Réjouis-toi, toi qui as reçu la plus grande des grâces, le Seigneur est avec toi.»

29 À ces mots, elle fut très troublée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation.  30 L'ange lui dit: «Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. 31 Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. 32 Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père;  33 il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n'aura pas de fin.» 34 Marie dit à l'ange : « Comment cela se fera-t-il puisque je n'ai approché aucun homme ? » 35 L'ange lui répondit: «L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu. 36 Et voici que Élisabeth, ta parente, est elle aussi enceinte d'un fils dans sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, elle qu'on appelait la stérile, 37 car rien n'est impossible à Dieu.»

38 Marie dit alors: «Je suis l'esclave du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu me l'as dit!» Et l'ange la quitta.

Prédication

            Chaque fois que ce texte arrive dans la liste des lectures du dimanche, c’est la même question qui se pose de nouveau. Cette question d’ailleurs se pose aussi lorsque nous confessons la foi chrétienne en récitant le Symbole des Apôtres qui affirme, s’agissant de Jésus Christ, qu’il est notre Seigneur, qu’il a été conçu du Saint Esprit et qu’il est né de la vierge Marie.

            Cette question qui se pose est très simple, et d’ailleurs, la voici : « Crois-tu cela ? C’est un peu familier de la poser en tu ; mais la confession de foi est en je… Crois-tu que Jésus Christ, ton Seigneur, a été conçu du Saint Esprit et qu’il est né de la vierge Marie ?

            Sous cette forme, la question est peut-être trop personnelle pour que nous y répondions au cours du culte. Donnons-lui une forme un peu plus neutre : Qu’est-ce que croire, qu’est-ce que cela signifie, de croire que Jésus Christ a été conçu du Saint Esprit et est né de la vierge Marie ? Nous allons tâcher de répondre à cette question en reprenant les quelques versets de Luc qui sont proposés à notre lecture et à notre méditation.

            1.  Croire Jésus Christ conçu du Saint Esprit et né de la Vierge Marie, c’est d’abord croire. Croire, c’est un verbe ; en disant que c’est un verbe nous pensons à Rudolf Bultmann (1884-1976), théologien allemand important du XXe siècle, dont l’ouvrage majeur a pour titre en allemand Glauben und Verstehen, deux verbes, titre traduit en français par Foi et compréhension, qui sont deux substantifs. Les traducteurs français font assez souvent cela, rendre des verbes conjugués par des noms communs. En traduisant la pensée et la foi en noms plutôt qu’en verbes, ils la rendent plus saisissable. Mais la foi n’est pas quelque chose qui peut être figé dans des énoncés ni saisi. Il n’y a pas de foi si ce n’est croire, l’activité de croire, croire, questionner, répondre et agir.

           2.  Par ordre d’apparition dans le texte, l’ange est le premier qui agit. Il agit d’ailleurs d’une manière assez cavalière, il s’invite, il salue, il proclame… En tant qu’ange, il est parole de Dieu. N’oublions jamais que dans la tradition qui est la nôtre, et nous sommes en cela héritiers des Hébreux, la parole de Dieu dit ce qu’elle fait et fait ce qu’elle dit, toujours. 

            a.      Il faudrait que nous ayons une conjugaison spéciale de nos verbes qui servirait à dire le passé, l’avenir et le présent de ce que l’ange dit à Marie. Cette conjugaison particulière du verbe nous permettrait de mieux percevoir – percevoir pourtant sans la saisir – cette parole. Ce que l’ange dit à Marie, c’est que la plus grande des grâces lui a été faite, lui est faite et lui sera faite, et que le Seigneur a été, sera et est avec elle.
          b.     L’ange annonce, et l’ange aussi explique. Encore que, peut-être, le verbe expliquer ne soit pas le plus adapté : il n’y a rien à expliquer… L’ange accompagne, c’est plus juste. Marie s’étonne – qui ne s’étonnerait pas ? – et l’ange accompagne Marie qui s’étonne.

                       i.  « L’esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre », ça n’est pas une explication. Ces événements-là ne s’expliquent pas. Ils se vivent seulement. On peut bien entendu mettre des mots sur ces événements, mais ce sont de simples et pauvres mots qui aident un peu à recevoir ce qui advient, en ne le craignant pas trop.

                     ii.     Ce que sont aussi, dans la bouche de l’ange, les mots qui affirment que « Rien n’est impossible à Dieu. » Ils sont aussi de pauvres mots, prononcés dans l’intimité profonde d’une conversation qui ne devient pour nous audible et visible que par l’indiscrétion d’un grand auteur. Tous ces mots sont dits et tout ce qui est dit par ces mots s’accomplit en même temps,  car il en est ainsi de l’ange qui est la parole de Dieu. Et aussi vrai que qui veut faire l’ange fait la bête, ces mots ne peuvent être entendu que dans l’intimité, dans cette intimité même que l’ange vient rompre et habiter avec de s’en aller tout comme il est venu, sans tambour ni trompette.

             3.     Par ordre d’apparition dans le texte, Marie. Nous savons tous la place que Marie occupe dans l’histoire de la chrétienté, celle d’un exemple érigé parfois en modèle superlatif de la femme, celle à laquelle les protestants ne sont pas censés croire, alors que Luther l’appelait Mère de Dieu…

            a.      Croire que Jésus Christ a été conçu du Saint Esprit et est né de la vierge Marie, c’est prendre acte et toujours maintenir la simplicité et la discrétion de Marie, certes visitée par l’ange Gabriel, mais avant tout, et après tout, une toute jeune femme dans un monde masculin.

            b.     C’est aussi s’étonner d’abord en silence, même si l’on est extrêmement troublée à l’intérieur. C’est aussi demander qu’on vous explique – c'est-à-dire avoir l’audace de demander des explications à l’ange de Dieu, c'est-à-dire à Dieu lui-même.

            c.      Dieu là-dessus n’est pas toujours un très bon pédagogue… et c’est parce que Dieu essaie de parler avec les humains, donc dans le langage des humains, qui est un langage assez limité. Annonce faite à Marie : « …tu as reçu la plus grande des grâces… », explication donnée à Marie : « L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu. » Une explication qui n’explique rien du tout…

                       i.     Et qui nous suggère de dire que croire que Jésus a été conçu du Saint Esprit et qu’il né de la vierge Marie, c’est un peu au moins être indulgent avec l’ange… c'est-à-dire avec Dieu

            d.     C’est aussi ne pas chercher des explications au pourquoi du comment, mais retenir dans son cœur l’incompréhensible qui advient, le vivre, et en chercher la signification et le sens, peut-être pendant des années. 

            e.      Croire enfin, à l’exemple de Marie, devant l’inexplicable – si c’était explicable, si cela pouvait être saisi, ça ne serait pas la parole de Dieu – c’est dire oui. « Je suis la servante du Seigneur » Les traducteurs hésitent à écrire esclave, alors que ce mot dit que ce que Marie croit, c'est-à-dire reçoit et va faire, ne correspond à aucun mérite et ne réclame aucune rétribution.

4.               4. Et là-dessus, l’ange la quitta. Alors Marie se retrouve seule, seule dans l’ordinaire des jours. Elle ne revendiquera jamais rien au titre de cette rencontre extraordinaire, ni au titre de sa propre élection. Elle aura vécu quelques instants secrets mis en face du temps qu’il faut pour mettre un enfant au monde et l’élever, la toute puissance de Dieu mise en face de ce qui doit être simplement accompli, une journée après l’autre, et en quoi se construisent les plus grandes bénédictions. Croire Jésus Christ conçu du Saint Esprit et né de la vierge Marie, c’est justement cela. Ce que l’apôtre Paul, pour sa part, appellera l’obéissance de la foi.  

          Jésus a été conçu du Saint Esprit et est né de la vierge Marie. Nous croyons cela, c'est à dire qu'il est en train, en nous, d'être conçu du Saint esprit et né de la vierge Marie. Nous le portons en nous, et nous le portons hors de nous, il vit en nous et il vit hors de nous, c'est notre vie qui le manifeste, nos convictions et notre engagement dans l'ordinaire des jours. Amen

samedi 12 décembre 2020

L'effacement de soi (Jean 1,6-8 et 19-28) Troisième dimanche de l'Avent

Jean 1

6 Il y eut un homme, envoyé de Dieu: son nom était Jean. 7 Il vint en témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui. 8 Il n'était pas la lumière, mais il devait rendre témoignage à la lumière. (…)

19 Et voici quel fut le témoignage de Jean lorsque, de Jérusalem, les Judéens envoyèrent vers lui des prêtres et des lévites pour lui poser la question: «Qui es-tu?» 20 Il déclara, sans aucune ambiguïté il déclara: « Moi, je ne suis pas le Christ.» 21 Et ils lui demandèrent: «Qui es-tu? Es-tu Elie?» Il répondit: «Je ne le suis pas.» - «Es-tu le Prophète?» Il répondit: «Non.» 22 Ils lui dirent alors: «Qui es-tu?... que nous apportions une réponse à ceux qui nous ont envoyés! Que dis-tu de toi-même?» 23 Il affirma: «Je suis la voix de celui qui crie dans le désert: ‹Aplanissez le chemin du Seigneur›, comme l'a dit le prophète Ésaïe.»

24 Or ceux qui avaient été envoyés étaient des Pharisiens. 25 Ils continuèrent donc à l'interroger en disant: «Si tu n'es ni le Christ, ni Elie, ni le Prophète, pourquoi baptises-tu?» 26 Jean leur répondit: «Moi, je baptise dans l'eau. Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas; 27 il vient après moi mais je ne suis même pas digne de dénouer la lanière de sa sandale.»

28 Cela se passait à Béthanie, au-delà du Jourdain, où Jean baptisait.

Prédication :

Dans le monde où vivait Jésus, le judaïsme avait revêtu bien des costumes et il montrait bien des visages. Le visage du culte sacrificiel au Temple de Jérusalem, le visage des prouesses ascétiques des hommes de Qumran, le visage des sophistications des Pharisiens, entre autres… et celui du baptisme.

Recevoir un baptême attestant une conversion éthique, c’est une forme très simple de religion. Pas de sacrifices, pas de grands textes fondateurs, ni de grands textes directeurs, le baptisme est juste une attente de la fin des temps associée à une certaine manière de vivre cette attente, c’est à peu près tout ce que nous savons du mouvement baptiste. Il a laissé quelques traces, mais il n’a laissé aucune archive. Le baptisme, qui était donc l’une des sensibilités du judaïsme, semble n’avoir pas été lui-même homogène. Les formes de l’attente, les formes du baptême, la distinction d’avec des ablutions, l’ouverture éventuelle sur l’universel… autant de baptismes différents les uns des autres. Jean le Baptiste, dont les quatre évangiles conservent la mémoire, était lui-même un leader singulier dans ce petit monde baptiste. Avec quatre évangiles, nous pourrions faire quatre portraits presque identiques les uns aux autres – nous gardons cela pour une peut-être prochaine étude biblique… Nous nous en tenons à quelques indications fournies par l’évangile de Jean. 

« 6 Il y eut un homme, envoyé de Dieu: son nom était Jean. 7 Il vint en témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui. 8 Il n'était pas la lumière, mais il devait rendre témoignage à la lumière. »

Comment peut-on rendre témoignage à la lumière ? Rendre témoignage à la lumière, ça n’est pas voir la lumière, mais la donner à voir. Mais comment un homme peut-il donner à voir la lumière qui illumine tout homme ? En recevant cette lumière et en la réémettant. Mais il ne peut pas réémettre cette lumière tout comme il l’a reçue. La lumière émise, réémise ou transmise par un corps est toujours caractéristique de ce corps. Et il n’est que le vide qui laisse passer la lumière sans la modifier. Alors, si seul le vide peut transmettre fidèlement la lumière, il nous vient à l’esprit cette prière très mystique : « Mon Dieu, accordez-moi de devenir rien » (Simone Weil). Prière qui, si Dieu se mettait à l’exaucer, disparaîtrait en même temps que celui qui la prie. Peut-être serait-ce une bénédiction pour celui qui prie cette prière, mais pour le simple croyant, quelque chose serait irrémédiablement perdu : le témoin et son témoignage. Or, Jean « vint en témoin pour rendre témoignage à la lumière… ».

            Mais comment Jean pouvait-il venir en témoin ? Comme nous le faisons souvent, nous allons juste lire et proposer quelques remarques au sujet de l’effacement du témoin, l’effacement de Jean le Baptiste.        

Dire ce qu’on n’est pas, dissiper les malentendus et résister aux tentations (effacement 1)

            Tout nouveau message est toujours d’abord confronté aux attentes de ses contemporains. Et tout nouveau messager est tenté de prendre à son avantage les figures de l’attente de ses contemporains et de se faire passer pour celui qu’il n’est pas. Lorsque les peuples sont en attente de quelque chose, il y a toujours des messies pour le leur proposer... Et même si celui qui propose le fait sans malice, le risque de malentendu ne peut jamais être totalement écarté. Qui es-tu, demande-t-on quatre fois à Jean le Baptiste ? Trois fois il dira qui il n’est pas : il n’est pas le Christ, il n’est pas Élie, il n’est pas le Prophète.

En ces trois noms nous pouvons voir trois formes différentes d’attente de la fin. Le nord de la Palestine gardait encore le souvenir du prophète Élie, un homme à la puissance extraordinaire, qui avait libéré le royaume de forces étrangères, oint des rois et qui, enlevé par un char de feu suspendu quelque part entre ciel et terre, pouvait revenir à n’importe quel instant. En Élie on imaginait une restauration politique. D’autres attendaient Le Prophète, un héraut des derniers temps et juge des peuples. D’autre encore attendaient le Christ, un roi-prêtre, maître de l’interprétation et du jugement, guérisseur et faiseur de miracles ; cette attente était peut-être la plus ardente, et la plus protéiforme de ce temps-là. Là où l’attente est forte la tentation est forte aussi. Dans le premier chapitre de l’évangile de Jean, nous voyons que le Baptiste ne cède pas à la tentation de se faire passer pour autre qu’il n’est. Il dit ce qu’il n’est pas, et il agit aussi simplement qu’il est possible, en baptisant.

C’est déjà un pas dans la direction de l’effacement, mais il ne suffit pas de dire qui l’on n’est pas ; il faut aussi dire qui l’on est.

Jean Le Baptiste, Léonard de Vinci

Dire qui l’on est (effacement 2)

Rendre témoignage à la lumière en disant soi-même qui l’on est, n’est-ce pas faire obstacle à la lumière, n’est-ce pas se rendre témoignage à soi-même ? Pour répondre à cette objection, Jean le Baptiste puise dans la tradition prophétique.

Un prophète, c’est un homme qui parle de la part de Dieu. Mais lorsque cette parole est consignée dans un livre et que ce livre commence à être reçu et diffusé, un prophète c’est le livre. Le livre pérennise la parole. En citant le prophète Ésaïe, Jean le Baptiste remet en avant la parole et s’efface lui-même devant cette parole. Jean le Baptiste n’est qu’une voix qui rappelle une autre voix qui, quatre siècles plus tôt, recommandait qu’on se prépare, contre toute attente, à une nouvelle, prochaine et libératrice intervention divine. « Dans le désert, préparez le chemin du Seigneur, faites droits, faites simples, ses sentiers – c’est qu’il arrive, et c’est même qu’il est là et que vous ne le savez pas… ».

Renvoyer à la parole prophétique, s’effacer devant cette voix ancienne et toujours actuelle, c’est encore une étape de l’effacement, mais est-ce un effacement suffisant pour que ce soit la lumière qui soit manifestée et reconnue ?

Le rituel (effacement 3) Le rituel participe de l’effacement

Lorsque Jean le Baptiste renvoie à la parole prophétique, c’est encore lui qui parle. Il faudrait qu’il puisse se taire. Il nous faut donc aller plus loin encore dans le parcours de l’effacement.

En plus de restituer la parole prophétique, Jean le Baptiste baptisait. Gageons qu’il avait des assistants et qu’il n’était pas le seul à baptiser ceux qui venaient vers lui. Nous ne connaissons pas le détail liturgique du baptême de Jean le Baptiste. Nous n’avons pas de formule baptismale, ni de formule d’engagement. Il nous suffit de nous rappeler que le baptême, comme tout autre rituel, peut être accompli par toutes sortes de personnes. Peu importe même de savoir réellement qui baptise, car le baptême est au fond une affaire entre celui qui reçoit le baptême et celui au nom de qui l’on baptise. Et ainsi, le baptême participe aussi de l’effacement du Baptiste, de la transparence dont nous parlons depuis tout à l’heure. Mais ça n’est pas fini.

Jean Baptiste prêchant dans le désert, Raphaël Mengs, 1760

Il est déjà là (effacement 4)

Il y a une dernière étape, dernière et ultime. Elle prend la forme d’une affirmation que fait Jean le Baptiste. « Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas. »

« Il vient après moi », affirme Jean le Baptiste, ce qui ne signifie pas – ou du moins pas seulement – que Jésus arrive chronologiquement après lui. Cela signifie que le Christ est là depuis toujours, et que pour qui veut le donner à voir, il faut en passer par toutes les étapes de l’effacement par lesquelles Jean est passé…

Et cela suffira-t-il pour que la lumière soit vue ? Cela suffira-t-il pour que les auditeurs de la prédication de Jean, pour que les disciples de Jean, reconnaissent et suivent celui qui est la lumière ?

Pas tout à fait. Nous lisons encore : « Le lendemain, Jean se trouvait encore au même endroit avec deux de ses disciples. Fixant son regard sur Jésus qui marchait, il dit "Voici l’agneau de Dieu." » A ce moment, l’effacement de Jean le Baptiste devant Jésus, Fils de Dieu, lumière née de la lumière et vrai Dieu né du vrai Dieu… l’effacement de Jean le Baptiste est accompli. « Les deux disciples, l’entendant parler ainsi, suivirent Jésus. »

Agneau de Dieu, Francisco de Zurbarán, c. 1635-1640. 

Ce Christ, celui qui porte le péché du monde,… puissions-nous le voir et le suivre, puissions-nous aussi le donner à voir. Amen

samedi 5 décembre 2020

Consolation et commencement (Esaïe 40:1-11 ; Marc 1:1-8) Deuxième dimanche de l'Avent

Esaïe 40 

1  Consolez, consolez mon peuple, Dit votre Dieu. 2 Parlez au cœur de Jérusalem, et criez lui Que sa servitude est finie, Que son iniquité est expiée, Qu'elle a reçu de la main de l'Éternel Au double de tous ses péchés.

3 Une voix crie: Préparez au désert le chemin de l'Éternel, Aplanissez dans les lieux arides Une route pour notre Dieu.4 Que toute vallée soit exhaussée, Que toute montagne et toute colline soient abaissées!  Que les coteaux se changent en plaines, Et les défilés étroits en vallons ! 5 Alors la gloire de l'Éternel sera révélée, Et au même instant toute chair la verra; Car la bouche de l'Éternel a parlé.

6 Une voix dit: Crie ! -Et il répond: Que crierai -je? Toute chair est comme l'herbe, Et tout son éclat comme la fleur des champs. 7 L'herbe sèche, la fleur tombe, Quand le vent de l'Éternel souffle dessus. -Certainement le peuple est comme l'herbe: 8 L'herbe sèche, la fleur tombe; Mais la parole de notre Dieu subsiste éternellement. 

9 Monte sur une haute montagne, Sion, pour publier la bonne nouvelle; Élève avec force ta voix, Jérusalem, pour publier la bonne nouvelle; Élève ta voix, ne crains point, Dis aux villes de Juda: Voici votre Dieu ! 10 Voici, le Seigneur, l'Éternel vient avec puissance, Et de son bras il commande; Voici, le salaire est avec lui, Et les rétributions le précèdent. 11 Comme un berger, il paîtra son troupeau, Il prendra les agneaux dans ses bras, Et les portera dans son sein; Il conduira les brebis qui allaitent.

 Marc 1 

1 Commencement de l'Évangile de Jésus Christ Fils de Dieu:

2 Ainsi qu'il est écrit dans le livre du prophète Esaïe, Voici, j'envoie mon messager en avant de toi, pour préparer ton chemin. 3 Une voix crie dans le désert: Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers.

4 Jean le Baptiste parut dans le désert, proclamant un baptême de conversion en vue du pardon des péchés. 5 Tout le pays de Judée et tous les habitants de Jérusalem se rendaient auprès de lui; ils se faisaient baptiser par lui dans le Jourdain en confessant leurs péchés. 6 Jean était vêtu de poil de chameau avec une ceinture de cuir autour des reins; il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage. 7 Il proclamait: «Celui qui est plus fort que moi vient après moi, et je ne suis pas digne, en me courbant, de délier la lanière de ses sandales. 8 Moi, je vous ai baptisés d'eau, mais lui vous baptisera d'Esprit Saint.»

Prédication :

De ces deux extraits que nous venons de lire, nous allons conserver deux mots, un verbe, et un nom. 

Le verbe, c’est consoler, et il est à l’impératif, une forme même très insistante d’impératif hébraïque, qui dit tout à la fois l’urgence et la difficulté de la tâche. Nous pouvons même insister en disant que, s’il y en a, ceux qui répondront à cet impératif n’auront pas trop de tout leur temps, et n’auront pas non plus trop de tout ce qu’ils savent. Aggravons encore un peu le propos rajoutant qu’ils s’attellent à une tâche d’une durée infinie, et pour laquelle ils ne sont pas vraiment équipés. La langue grecque ajoute quelque chose encore au verbe consoler : qui veut consoler son prochain doit répondre à un certain appel, et doit se tenir tout proche de son prochain.

Il est bien connu qu’un train qui arrive à l’heure ne mérite pas les honneurs de l’information. Si le train déraille, c’est autre chose. S’il y a des victimes, c’est encore autre chose. Nous sommes extrêmement bien informés sur toutes sortes de catastrophes. Nous sommes aussi bien informés sur le devenir des victimes de catastrophes, sur ce qu’elles attendent des procès, sur leur indemnisations… mais le verbe consoler ne fait pas partie du vocabulaire journalistique. Ce doit être parce que ça évoque le couple mère-enfant, ou parce que ça évoque la religion… Mais ce doit être aussi parce que, toujours, le verbe consoler ne concerne en réalité que des inconsolables. La tâche est sans fin, et les consolateurs rares, ce qui fait que, dès le début du texte d’Ésaïe, l’impératif divin consolez est accompagné par un verbe dire qui est en même temps passé, présent et futur : consolez, consolez mon peuple, a dit votre Dieu, il l’a dit déjà et le dira encore !

Consolez mon peuple. Qu’est-il arrivé à ce peuple ? Nous pouvons imaginer Israël avant la déportation comme un pays de féodalité. Une royauté centralisée, des seigneurs et princes propriétaires terriens, une noblesse religieuse, et une masse de serfs et d’esclaves… L’empire babylonien, avec son intelligence propre, n’avait déporté que l’élite, et laissé sur place ceux qui travaillaient la terre. Le peuple dont parle Ésaïe est cette élite déportée, qui a perdu ses terres, ses esclaves, ses privilèges et ses jeunes enfants, sa capitale et son Temple, toutes sortes de choses irremplaçables, et ce peuple ne savait pas combien de temps durerait son exil, ni même si cet exil aurait une fin…

Consolez mon peuple, ordonne l’Éternel. Quelle consolation possible ? Les premiers versets d’Ésaïe affirment que la rétribution est finie. Ce que nous pouvons entendre de deux manières, (1) les fautes auxquelles sont attachées les horreurs de l’exil sont expiées et (2), plus important encore, l’idée même d’une correspondance entre fautes et expiation est finie.

Une parole qui se contenterait d’affirmer que Dieu remet les compteurs à zéro ne pourrait apporter aucune consolation, tout juste un soulagement, jusqu’à ce qu’un événement particulier ne vienne rappeler que le grand chef comptable divin a repris ses activités… et ça serait un recommencement, une répétition.

Cela peut donc être une consolation que d’affirmer que tout ce malheur qui est arrivé à Israël n’avait au fond rien à voir avec toutes sortes de péchés, mais n’était que ce qui arrive à un fétu de paille balayé par tumultueux torrent de l’histoire. Affirmer cependant qu’il n’y a plus de rétribution, ça ne peut pas être tout ; si du paysage de la foi l’on dégage les mérites et les punitions, que reste-t-il ?

Dans le prophète Ésaïe, là où nous lisons aujourd’hui, nous osons dire que, de la rétribution, en bien comme en mal, il ne reste rien. Ce qui permet de repérer, par deux fois, autre chose. Au premier verset, le verbe dire n’est pas simplement au présent. Dieu parle, c’est entendu, mais nous pouvons entendre d’avantage que le présent ; c'est-à-dire qu’il a parlé, qu’il parle et qu’il parlera, c'est-à-dire aussi qu’il a agi, qu’il agit et qu’il agira. Et donc que rien de ce qui est arrivé, qui arrive ou arrivera ne correspondra à une récompense ou à une punition divine, ce qui signifie que rien ne sera étranger à Dieu, tout court. Le bien qui nous arrive et le mal qui nous arrive, ne correspondent ni à une punition ni à une récompense, et ne sont pas du tout étrangers à Dieu.

Mais cette idée est extrêmement dérangeante. Elle laisse la foi en Dieu extrêmement démunie, aussi seule que la foi seule. Au point que, peut-être, à cet instant, celui qui veut encore croire en Dieu se dit que, finalement, rétributions négative et positive, c’était plus simple. C’était effectivement plus simple, un peu comme être esclaves en Égypte était plus simple qu’être libre dans le désert… Allons-nous faire machine arrière ? Allons-nous nous contenter d’une répétition, de recommencer ? 

Il y a quelques minutes, nous annoncions une méditation en deux temps, sur le verbe consoler d’abord puis le mot commencement. Comme il est écrit « commencement de l’Évangile de Jésus Christ Fils de Dieu », et ce premier verset de l’évangile de Marc peut être compris comme le signal comme quoi le verset suivant, et les versets suivants jusqu’à la fin du 16ème chapitre sont l’Évangile de Jésus Christ Fils de Dieu. Mais il possible aussi de considérer que le premier verset de Marc est en fait le titre de tout l’ouvrage. A partir de Marc 1:2 et jusqu’à Marc 16:8, ça n’est que le commencement.

Dans les quelques versets de Marc que nous commentons, si étroitement liés au 40ème chapitre du prophète Ésaïe, nous pouvons trouver tout ce que nous avons dit déjà de la consolation ; et nous pouvons trouver aussi, dans les deux textes, le commandement de défricher, d’aplanir, et de rendre simple et droits, le chemin du Seigneur. Qu’est-ce à dire ? Peut-être est-ce à dire qu’un commencement n’est pas un recommencement, et que, pour éviter justement qu’un commencement ne soit un recommencement il faut défricher, aplanir… faire du ménage, éliminer les ronces du mérite, les lianes de la rétribution, aplanir les sommets de la spiritualité et combler les abîmes du soi-disant silence de Dieu. Ce que fait Jésus, ce qu’il enseigne à faire, tout le temps que dure le récit de Marc, et tant que dure et durera la lecture du récit de Marc.

Et après ? Lorsque nous arrivons au matin de Pâques, dans l’évangile de Marc, les femmes vont au tombeau, le trouvent vide, rencontrent des anges qui les envoient vers les disciples. Mais elles s’enfuient, sous l’effet de la peur, n’ayant rien dit à personne. Comment sait-on qu’il y a une suite, si les seuls témoins que le texte mentionne se taisent à jamais ? D’autres mains que celle de Marc, prolongeant celle de Marc, ont répondu à cette question en rajoutant des récits d’apparitions du  ressuscité, et des récits d’envoi en mission des Apôtres. Et ainsi le commencement est accompli.

Mais lorsque les femmes quittent la scène du tombeau en emportant, et en ensevelissant, avec elles l’annonce de la résurrection, le commencement reste un commencement ouvert. Et c’est au lecteur qui n’a pourtant que le commencement de l’Évangile, qu’il appartient de continuer l’Évangile, en paroles de liberté et en actes marqués par la grâce. Nous empruntons pour finir quelques mots à La règle de Reuilly « Il nous faut non seulement, aimer l’Évangile, contempler l’Évangile, apprendre l’Évangile, vivre l’Évangile, souffrir l’Évangile, mais encore, avec notre chair et notre sang, continuer l’Évangile. » 

Amen

samedi 28 novembre 2020

Il est impératif de veiller (Marc 13:33-37) Premier dimanche de l'Avent

 Marc 13

33 « Prenez garde, restez éveillés, car vous ne savez pas quand ce sera le moment. 34 C'est comme un homme qui part en voyage: il a laissé sa maison, confié à ses serviteurs l'autorité, à chacun sa tâche, et il a donné au portier l'ordre de veiller. 35 Veillez donc, car vous ne savez pas quand le maître de la maison va venir, le soir ou au milieu de la nuit, au chant du coq ou le matin, 36 de peur qu'il n'arrive à l'improviste et ne vous trouve en train de dormir.

37 Ce que je vous dis, je le dis à tous : veillez. »

Prédication :

            Et voici un impératif que nous avons déjà rencontré il y a peu. L’impératif de veiller. Nous lisions l’évangile de Matthieu, voici celui de Marc, avec les mêmes signes avant-coureurs de la même fin. Les évangélistes ne sont pas les seuls auteurs à avoir écrit sur les signes de la fin. Nous avons ce genre de texte aussi dans l’Ancien Testament (Ésaïe, Ézéchiel, Daniel…) et dans quantité d’écrits qui ne sont pas recueillis dans la Bible. Il y en a tant d’ailleurs, et à tellement d’époques différentes, qu’il est possible de dire que la production de ce genre de texte n’a jamais cessé. Ces récits ont été continûment inspirés les uns par les autres depuis que le monde est monde et qu’il a inventé l’écriture, chaque auteur ne faisant que rajouter aux textes de ses prédécesseurs ce que les progrès de la technique permettaient d’imaginer en fait de moyens de s’autodétruire… La fin de ces récits, finalement assez convenue, est toujours à peu près la même, celle d’une grande reconstruction. Et ces récits, depuis toujours, enthousiasment les uns pendant qu’ils assomment d’ennui les autres, et il ne semble pas qu’il y ait de moyen terme.

            Pourquoi ? Peut-être ces textes sont-ils une sorte d’écriture de l’espérance des impuissants... Mais il se passe aussi que toute pensée qui se plonge dans la religion reçoit une poussée du bas vers le haut, et du présent vers le futur, lui faisant imaginer un savoir de l’au-delà de tout ce qui est observable et une connaissance de la fin de toutes choses. En plus, s’exprimer avec autorité sur ces matières est une tentation à laquelle il semble extrêmement difficile de résister. Au point qu’il faut se demander pourquoi il n’y a pas une quatrième tentation évangélique qui porte là-dessus, tentation en face de laquelle, justement, serait dressé l’impératif de veiller ; cet impératif spécifique renouvellerait d’ailleurs notre interprétation de l’épisode de Gethsémanée : « Veillez et priez afin de ne pas tomber au pouvoir de la tentation » (Mar 14:38) – rendez-vous pris pour la prochaine Semaine Sainte.

            Peut-être est-ce en résistant à cette quatrième tentation que l’auteur de l’évangile de Marc, le premier, a innové, en ne considérant pas que les récits de la fin parlent de la fin, mais en considérant plutôt qu’ils parlent d’un commencement, commencement d’un engagement stupéfiant, engagement de Jésus Christ qui va se dessaisir totalement de lui-même, jusqu’à la mort sur la croix, et engagement ultime de Dieu qui va se dessaisir totalement de lui-même en ramenant Jésus Christ de la mort à la vie. Figure de cet engagement, l’incarnation, et moment essentiel de cette incarnation, Noël.  Aujourd’hui, c’est le premier dimanche de l’Avent, et au bout de cette période de l’Avent, ça sera Noël.

             Aujourd’hui, l’impératif que nous recevons, c’est de veiller, « de peur qu’il n’arrive à l’improviste et ne vous trouve en train de dormir. » Le sommeil est indispensable à la vie humaine, et nous n’allons pas passer du temps à imaginer un ministère de veilleur de nuit ni l’organisation de quarts comme on le fait sur les navires.

            Le contraire de veiller c’est dormir, c’est entendu. Mais ça n’est pas seulement de la veille et du sommeil somatiques que Jésus parle ici. La petite histoire qu’il sert à ses auditeurs, trop simple pour être une parabole, vient à la suite du récit convenu des signes de la fin, récit enrichi de quelques phrases qui placent l’ignorance en face du savoir, tout comme Jésus place la veille en face du sommeil.

Il existe pour la vie, disons d’abord pour la vie spirituelle, une sorte de sommeil qui est un sommeil toxique. Pour tâcher d’expliquer ce qu’est ce sommeil, nous pouvons nous souvenir d’une querelle entre deux prophètes et sur la durée de l’exil. Une partie de l’élite de Jérusalem avait été exilée en Babylonie (~ 590 av. J.C.). Combien de temps cet exil allait-il durer ? Le prophète Hananyah annonça une durée de deux ans, le prophète Jérémie annonça une durée de 70 ans, assortissant cette durée d’un encouragement à continuer à vivre, bâtir des maisons, cultiver des jardins, faire des enfants (Jérémie 27-28). Deux années, à peine plus qu’un battement de cils, c’est peut-être un savoir vérifiable, mais c’est surtout une durée imaginaire, une prédiction qu’on a plaisir à faire, plaisir à entendre, qui ne prépare aucun avenir, qui ne laisse aucun espace d’ouverture pour les surprises de la vie et qui, dans ce sens, est toxique. Alors que 70 années, un coup de massue peut-être lorsqu’on l’entend la première fois, c’est à peu près trois générations et compte tenu de la stabilité des empires c’est une durée réaliste, c’est surtout, dans la bouche de Jérémie, le commandement de continuer à vivre. Et que s’est-il passé 70 ans plus tard ? Le livre d’Esdras s’ouvre sur une réalisation calendaire de la prophétie de Jérémie, et sur la belle histoire d’un retour massif des exilés à Jérusalem… un retour massif qui n’a jamais eu lieu. Plus qu’un retour massif c’est un courant d’échange permanent qui s’est établi entre le judaïsme de Judée et le judaïsme de Babylonie, où à force de veille une espérance millénaire avait pu prendre corps, espérance qui permit au judaïsme de ne pas se perdre lorsque c’est à l’échelle de l’empire romain qu’il dut se disperser. 

Dans l’évangile de Marc, le commandement de veiller vient juste avant que le complot contre Jésus entre dans sa phase active. « La Pâque et la fête des pains sans levain devaient avoir lieu deux jours après. Les grands prêtres et les scribes cherchaient comment arrêter Jésus par ruse pour le tuer. » Le moment tragique de l’incarnation en était à son commencement, dont nous reparlerons bientôt.

Qu’en est-il aujourd’hui, premier dimanche de l’Avent, de cet impératif. Nous pouvons veiller avant l’incarnation. Nous connaissons le déroulement de l’année liturgique. Nous savons que chaque année, au moment où nous célébrons l’avènement de la Seigneurie du Christ sur toutes choses (fête du Christ Roi de l’Univers, dernier dimanche avant l’Avent), c'est-à-dire au moment où nous célébrons la fin de l’histoire, nous sommes tout proches de célébrer la faiblesse du Christ, enfant nouveau-né, sur la paille de la crèche. Cela ressemble à un perpétuel retour des choses… cela y ressemble seulement. C’est beaucoup plus que cela. Le Christ Roi de l’Univers veille sur l’humanité entière, mais sur la paille de la crèche, qui va veiller sur lui ? L’enfance de Jésus Christ n’a pas retenu l’attention de l’évangéliste Marc. Mais Matthieu et Luc en ont parlé : Jésus est un enfant sur lequel des parents ont veillé. Mais lorsque nous parlons de la crèche, nous ne parlons pas seulement de l’enfant, nous parlons aussi de l’incarnation. Nous pouvons veiller avant l’incarnation, mais c’est une autre question qui se pose à nous : qui va veiller sur l’incarnation ? Qui va veiller à ce que le mouvement décisif de Dieu vers l’homme, que les évangélistes ont mis en récits, que les théologiens tâchent de penser, que les liturgies célèbrent, soit et demeure toujours un engagement concret de l’homme vers l’homme, une ouverture, une amitié, une fraternité, une diaconie… ?

« Ce que je vous dis, je le dis à tous : veillez ! » Non pas sur les signes des temps ni sur l’accomplissement littéral de telles et telles prophéties, un peu, peut-être, mais certainement pas d’une manière essentielle. D’une manière essentielle veillez les uns sur les autres. L’impératif est là. Notre réponse positive est attendue.

Que Dieu nous soit en aide. Amen


mercredi 25 novembre 2020

Lettre pastorale du 25 novembre : ceux qui pleurent


« Heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés »


     Parmi différentes sortes de pleurs, nous en retenons trois. Des pleurs qui jaillissent immédiatement, dès que l’accident est arrivé, dès l’annonce d’un événement tragique. Ces pleurs sont le signe d’un débordement émotionnel, ils peuvent assez rapidement cesser, mais parfois durent toujours. Il y a aussi des pleurs rituels qui durent le temps que dure une cérémonie. Et il y a des pleurs de deuil, auxquels il est difficile d’assigner une durée, qui durent tant que dure le deuil, qui sont parfois secrets, parce que les grandes douleurs sont muettes, et qui peuvent ne jamais cesser tout à fait, tant il est vrai que certains deuils sont interminables. Toutes ces sortes de pleurs sont repérables dans les textes bibliques, avec autant de verbes. Dans la troisième des Béatitudes (Matthieu 5:5) le verbe utilisé suggère qu’il est plutôt question des pleurs de deuil, mais nous allons tout de suite voir qu’il n’est pas seulement question du deuil.

            L’évangile de Matthieu conserve le récit d’un massacre d’enfants ordonné par le roi Hérode, il garde le souvenir des pleurs des mères de ces enfants, « une voix dans Rama s'est fait entendre, des pleurs et une lamentation : c'est Rachel qui pleure ses enfants et ne veut pas être consolée, parce qu'ils ne sont plus » (Matthieu 2:18). Premiers et seuls pleurs rapportés après ce massacre, ils sont le signe d’une souffrance qui ne cessera jamais, d’une souffrance indéfiniment recommencée et qui fera échouer toute tentative de consolation, d’une souffrance qui atteint jusqu’à la volonté même de celles qui ont été frappées. Pourvu qu’à cette souffrance il ne soit jamais opposé catégoriquement que notre Seigneur Jésus Christ a affirmé Heureux ceux qui pleurent, ils seront consolés. Plus qu’une sorte de principe, la Béatitude est ici une confession de foi, qui doit parfois, question de tact, rester silencieuse et demeurer s’il le faut pour toujours la main secourable qui se tend, et que personne ne saisit.

         Pleurs de deuil : du temps a passé et la blessure vive, suturée, pansée, est en voie de cicatrisation… Le temps très figé de l’effarement rejoint le temps plus fluide d’une vie ordinaire. Comment passe-t-on d’un temps à un autre temps ? Nous l’observons, nous le ressentons, mais nous ne savons pas comment. Quant au cheminement du deuil, se fait-il sans aide extérieure ? Observons que le verbe consoler est à la voix passive : ils seront consolés, le processus est en route. Rien ne sera plus comme avant, mais il arrivera un temps où ils pourront repenser à ça sans être submergés par ce qu’ils ressentent. Qu’est-ce qui opérera la consolation, ou qui seront les consolateurs ? Dans ce processus, la Béatitude est porteuse de deux certitudes, portant justement l’une sur la consolation, et l’autre sur les consolateurs : il y en a, et il y en aura. Et ça n’est pas une certitude seulement, c’est une expérience. Chaque jour dure autant que le précédent, mais chaque fin de soirée, même au plus obscur de la nuit, a des allures discrètes d’un nouveau printemps, qui peut souvent émouvoir jusqu’aux larmes, larmes de joie, larmes de ceux qui regardent toute leur vie, et la regardent en paix. De nouveau, chaque journée peut apporter ce qu’il faut de rencontres, de surprises et d’étonnement. Chaque journée peut de nouveau apporter le plaisir de l’étude et de la pratique religieuse. La vie même blessée y retrouve son sens. Heureux ? Sur le chemin de la consolation ; la Béatitude y est un double engagement, de celui qui accompagne, et de celui qui est accompagné.

             Et puis, ultimement, la Béatitude vient répéter, discrètement, secrètement, qu’il n’y a pas de vie perdue. C’est à l’intime que cela se dit, et dans un certain silence que cela se joue.

 

Pasteur Jean DIETZ, 25 novembre 2020


Culte dominical : https://www.youtube.com/channel/UCLEihGwqDjzHjWjmYnP2_2Q

Offrande en ligne : https://www.eglise-protestante-unie.fr/vincennes-montreuil-p71320/don

samedi 21 novembre 2020

Est-ce à Dieu que nous voulons avoir affaire ? (Matthieu 25,31-46)

Matthieu 25

31 «Quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, accompagné de tous les anges, alors il siégera sur son trône de gloire. 32 Devant lui seront rassemblées toutes les nations, et il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des chèvres. 33 Il placera les brebis à sa droite et les chèvres à sa gauche. 34 Alors le roi dira à ceux qui seront à sa droite: 

‹Venez, les bénis de mon Père, recevez en partage le Royaume qui a été préparé pour vous depuis la fondation du monde. 35 Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire; j'étais un étranger et vous m'avez recueilli; 36 nu, et vous m'avez vêtu; malade, et vous m'avez visité; en prison, et vous êtes venus à moi.› 37 Alors les justes lui répondront: ‹Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé et de te nourrir, assoiffé et de te donner à boire? 38 Quand nous est-il arrivé de te voir étranger et de te recueillir, nu et de te vêtir? 39 Quand nous est-il arrivé de te voir malade ou en prison, et de venir à toi?› 

40 Et le roi leur répondra: ‹En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits, qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait!›

41 Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche: ‹Allez-vous-en loin de moi, maudits, au feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges. 42 Car j'ai eu faim et vous ne m'avez pas donné à manger; j'ai eu soif et vous ne m'avez pas donné à boire; 43 j'étais un étranger et vous ne m'avez pas recueilli; nu, et vous ne m'avez pas vêtu; malade et en prison, et vous ne m'avez pas visité.› 44 Alors eux aussi répondront: ‹Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé ou assoiffé, étranger ou nu, malade ou en prison, sans venir t'assister?›

45 Alors il leur répondra: ‹En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous ne l'avez pas fait à l'un de ces plus petits, à moi non plus vous ne l'avez pas fait.›

46 Et ils s'en iront, ceux-ci au châtiment éternel, et les justes à la vie éternelle.»

Prédication :

            Serons-nous – serai-je – brebis ou chèvre ? Serons-nous placés à droite, ou à gauche ? Serons-nous des bénis ou des maudits ? Et finalement, sommes nous – suis-je – destinés à la vie éternelle ou au châtiment éternel ? Nous ne le savons pas. Bien sûr, nous aurons parfois donné à manger, donné à boire, recueilli, vêtu, soigné, et visité, ce qui nous destine à la vie éternelle. Et bien sûr, nous aurons parfois fait défaut, ce qui nous destine au châtiment éternel. Quant à nos actes, nous n’en aurons plus un seul souvenir, car la charité ne fait jamais le compte de ses actes, et l’indifférence le fait encore moins que la charité. Le grand juge, lui, qui siégera en pleine gloire, comment fera-t-il le total ? Nous ne le savons pas. Nous savons bien plutôt qu’il ne le fera pas, et il ne le fera pas parce que le résultat est connu – comme il est écrit – depuis la fondation du monde.

            L’évangile de Matthieu n’est pas le premier à parler ainsi de fin des temps, en utilisant des images pastorales. Ézéchiel (chapitre 34), au bas mot cinq siècles plus tôt, prophète du temps de l’exil babylonien, voit en Dieu lui-même le berger qui congédiera de mauvais bergers, et qui prendra soin de son troupeau, fortifiera les bêtes faibles, guérira les malades… et surtout rassemblera le troupeau dispersé. Ézéchiel voit en Dieu lui-même celui qui règlera leur compte à ceux qui, chargés de mener paître le troupeau, ne mènent paître qu’eux-mêmes. Ces gens-là, mauvais bergers, Ézéchiel les traite de bêtes grasses, et les promet à l’extermination.

            Avantage du prophète Ézéchiel sur l’évangéliste Matthieu : les bêtes grasses se distinguent aisément du reste des animaux. Mais pour ce qu’il en est de la séparation des justes dans l’évangile de Matthieu, c’est une toute autre affaire. Au fil des textes que nous avons lus et médités ces deux derniers mois, il a été question d’une invitation inespérée à une noce, mais avec un risque d’exclusion brutale ; il a été question aussi de dix jeunes femmes, et d’une noce aussi, mais cinq en furent exclues ; il a été question encore de trois serviteurs, mais un fut dépouillé puis jeté dehors. Et maintenant, avec le jugement dernier, il est question de vie éternelle, ou de châtiment éternel… et nous ne savons toujours pas pour qui. Car notre dernier texte peut conforter ceux qui sont les plus sûrs d’eux-mêmes, autant qu’il peut inquiéter d’avantage encore ceux qui sont déjà les plus inquiets.

            Si bien que revient une fois encore la question que nous avons posée ces dernières semaines : ces enseignements de Jésus, les chapitres 21 à 25 de Matthieu, que sont-ils donc ? Sont-ils des révélations particulières qui portent sur la fin des temps, l’élection et la réprobation, le salut et la damnation, pour qui et en fonction de quels mérites ? Ou bien sont-ils un enseignement sur ce qui advient dans les groupes, communautés ou Églises, lorsque leurs membres se mettent furieusement en quête de réponses à la question de leur propre salut ?

L’orientation de nos méditations a été dans le sens de cette deuxième question, et nous avons proposé cette réponse : lorsque les humains se mettent en quête de réponses à la question de leur propre salut, ils finissent toujours par justifier l’exclusion, celle des autres évidemment, et par justifier l’élection, la leur évidemment ; et pour être encore plus certains de ce qu’ils avancent, c’est dans la bouche de Jésus lui-même qu’ils trouvent les phrases qui les arrangent.

Si bien que c’est pour cela, et pour tâcher de désarmer cela, que Jésus a donné tous ces enseignements que nous avons médités. A chaque fois, la question posée, implicitement et explicitement, était toujours la même : « Voici ce qui peut advenir lorsque les temps se feront si durs que vous croirez que la fin est toute proche, voici ce qu’il en sera alors de la prédication du salut . Est-ce ce que vous voulez ? » Et tous ces textes préparent leur lecteur à dire non. Tous ces textes préparent leur lecteur à dire ceci : « Du jugement de Dieu nous ne voulons rien savoir. S’il y a ou s’il n’y a pas de jugement de Dieu nous ne voulons pas le savoir. Savoir que le savoir du jugement est un non savoir ne nous intéresse pas. Et si Dieu finalement juge mais ne condamne personne nous ne voulons pas le savoir non plus. Et pour finir, nous nous refusons même à dire que tout cela relève au fond du mystère de Dieu. »             

Au fond, la grande question qui est posée à leurs lecteurs par ces chapitres de Matthieu est celle-ci : « Est-ce à Dieu que vous voulez avoir affaire ? »

Notre travail de lecture et d’interprétation, et la conclusion tellement ouverte, tellement inattendue, de ce travail peuvent nous avoir persuadés que c’est bien de Dieu en Jésus Christ qu’il est question dans l’évangile de Matthieu (on pourrait, on devrait même, mener ce travail de lecture et d’interprétation sur d’autres grandes pages la Bible… mais restons-en provisoirement à Matthieu 21-25). Il y est bien question de Dieu, mais est-ce à Dieu que nous voulons avoir affaire ?

Au risque d’apparaître trop affirmatif, voire péremptoire, au risque donc d’une contradiction ruineuse, nous proposons ceci : si c’est un savoir que nous recherchons et trouvons dans ces chapitres, si c’est seulement la possibilité d’un savoir que nous cherchons et trouvons, alors ça n’est pas à Dieu que nous voulons avoir affaire. Si ces chapitres semblent soulever un coin du voile qui couvre un mystère, c’est une part du mystère de l’homme qu’ils dévoilent. Ce qui est dévoilé n’est pas très beau. Mais avec ce dévoilement, la question posée prend toute sa pertinence. Et tant que cette question est posée, ce qui est dévoilé n’est absolument pas une fatalité. Bien des croyants n’ont jamais abdiqué sur le thème de la foi seule, bien des croyants n’ont jamais cessé de n’avoir affaire qu’à Dieu. Bien des croyants n’ont jamais affirmé qu’une seule chose : Dieu seul est Dieu.

 Et c’est pourquoi le fin mot de l’évangile ne peut pas être que les réprouvés s’en iront au châtiment éternel et les justes à la vie éternelle. Voici donc le début de la suite-et-fin du récit : « Or, quand Jésus eut achevé toutes ces instructions, il dit à ses disciples : "Vous le savez, dans deux jours, c'est la Pâque : le Fils de l'homme va être livré pour être crucifié." » La suite, c’est l’engagement, celui de Jésus Christ qui va se dessaisir totalement de lui-même, jusqu’à la mort sur la croix, et c’est aussi l’engagement ultime de Dieu qui va se dessaisir totalement de lui-même en ramenant le Christ de la mort à la vie. Et nous aurons à dire alors, devant cet incroyable engagement du Fils et du Père, que c’est bien à Dieu que nous avons affaire, et bien à lui aussi que nous voulons avoir affaire.

Mais nous n’allons pas anticiper sur la semaine sainte qui viendra en son temps – que Dieu nous garde. Il est un autre moment de l’année liturgique où nous pressentons tout cela, c’est l’Avent, qui commence la semaine prochaine, et qui nous prépare à méditer sur l’accomplissement de toutes choses, accomplissement de la destinée même de Dieu qui advient dans une seule naissance.

 Sœurs et frères, patience dans l’azur, patience dans la crèche. Il vient. Amen



mercredi 18 novembre 2020

Lettre pastorale du mercredi 18 novembre. Les doux.

 

« Heureux les doux : ils hériteront de la terre »

Lorsque les Hébreux sortirent du désert après 40 années d’exode, et qu’ils commencèrent à entrer dans leur terre promise, cette terre était déjà occupée. Ceux qui occupaient cette terre seraient-ils enclins à la partager avec ces derniers venus ? Et les Hébreux eux-mêmes, forts de la promesse de leur Dieu, seraient-ils enclins à un partage ? La guerre était-elle inévitable et l’extermination en serait-elle la seule issue ? Lorsque nous lisons la Bible, à partir de l’Exode et jusqu’à la fin du livre de Josué, nous pouvons remarquer que la conquête n’a jamais été totalement achevée. Certains auteurs bibliques voient en cela le ferment d’une dégénérescence qui, des siècles plus tard, allait aboutir à l’exil, voire même à l’assimilation. D’autres auteurs, sotto voce, donnent à méditer sur des modes de cohabitation, des manières de partager de la terre. Et ces modes de partage peuvent être vus comme les germes d’une ouverture de la promesse à l’ensemble de toutes les nations. Des faucons d’un côté, et de l’autre des colombes, face à face, ainsi est le monde. Les faucons l’emportent-ils toujours ? Ceux pour qui la fin justifie les moyens vont-ils toujours mettre la main sur la terre qu’ils convoitent ? Ceux qui espéraient vivre pour toujours sur la terre de leurs pères devront-ils s’incliner et disparaître ?

Vision du prophète Zacharie : « Voici que ton roi s'avance vers toi ; il aime la justice, il sauve, il est doux, monté sur un âne, le petit d’une ânesse. » Zacharie imagine un roi qui prend la ville autrement qu’avec des machines de siège, un roi plein de douceur qui rend inutiles l’arc de guerre et le char de combat, un roi qui, depuis Jérusalem, établira la paix sur tout le Proche-Orient. Avec quels moyens ? Zacharie ne le dit pas. Le roi plein de douceur n’a que sa douceur et son amour concret de la justice pour sauver ses sujets de l’enchaînement toujours recommencé des violences. Avec ce roi, une paix douce et d’inspiration divine est inscrite sur l’horizon de l’histoire, mais que faire dans l’attente de l’avènement de ce roi ?

Réponse de Jésus à cette question : « Heureux les doux. » La deuxième des Béatitudes ne parle pas d’un roi. Elle renvoie à une expérience individuelle, l’expérience des doux. Qu’est-ce que l’expérience des doux ? Jésus dit de lui-même qu’il est doux (Matthieu 11:29). En quoi est-il doux ? Il est doux parce qu’il renonce à l’exercice de la violence et de la domination. Il est doux car en ce qu’il dit, et en ce qu’il fait, il engage entièrement sa propre personne. Il n’engage que sa propre personne ; ceux à qui il s’adresse, ceux qu’il nourrit ou guérit, restent toujours totalement libres de répondre, d’acquiescer ou de refuser, de bénir ou de maudire. Face à Jésus, l’être humain reste libre, toujours. Les doux sont ceux qui, atteints et convaincus par la douceur du Christ, choisissent avec lui la douceur. Affirmons aussi que même sans Christ il est possible d’être doux.

Quelle promesse pour les doux ? Ils hériteront la terre. Ils hériteront de ce pour quoi les humains se déchirent avec le plus de férocité : la terre. Cet héritage ne leur échoira pas à cause de leur lignée ; devant la douceur, la lignée n’est rien. Ni à force de douceur, ce serait une contradiction. Ils en hériteront toujours comme par pure grâce, même si leurs ancêtres étaient déjà là.

Les doux qui héritent de la terre n’ont aucun droit qu’ils fassent valoir sur la terre. Même gagnée par les doux, la terre reste la terre de la promesse, pour tous. Et même si la terre des doux semble parfois à jamais perdue, la promesse demeure. Et avec la promesse, l’espérance. 

Pasteur Jean DIETZ, 18 novembre 2020

Culte dominical : https://www.youtube.com/channel/UCLEihGwqDjzHjWjmYnP2_2Q

Offrande en ligne : https://www.eglise-protestante-unie.fr/vincennes-montreuil-p71320/don