Pour ne pas oublier
Lorsque David fut devenu vieux, il ne quittait plus
son palais. Le grand roi qu’il était ne guerroyait plus, d’autres le faisaient
en son nom et pour lui. Il vint à David l’idée de recenser tout son peuple. Le
récit de ce recensement, et de ce qui s’ensuivit, figure en 2 Samuel 24 et en 1
Chroniques 21. A l’origine de cette idée, Dieu lui-même, ou Satan, cela dépend
des auteurs. N’imaginez pas que furent comptés femmes, enfants et vieillards.
Seuls les hommes en âge de tirer l’épée furent dénombrés. Les deux récits
convergent vers des chiffres astronomiques, centaines de milliers, au-delà même
du million !
Ces résultats sont historiquement invraisemblables,
mais ils ont une valeur symbolique. La richesse et la prospérité du royaume
étaient considérables. Si considérable qu’un dénombrement était évidemment
inutile. Et quand bien même il eût fallu lever une armée, David ne pouvait pas
ignorer que Dieu lui avait donné la victoire, alors qu’il était tout seul face
à un certain Goliath, géant philistin…
Lorsque David fut devenu vieux, il eut un moment de
faiblesse qui lui fit oublier Dieu, qui lui fit perdre la foi. David oublia
donc que le trône sur lequel il était assis n’était pas le trône de David mais
le trône de Dieu, que le peuple n’était pas les sujets de David mais le peuple
de Dieu, et que les guerres qu’il avait menées n’étaient pas guerres de David,
mais les guerres de Dieu. En affirmant
cela, nous ne légitimons en aucun cas ce que furent évidemment ces
guerres ; conquêtes territoriales durables ou razzias saisonnières, elles
furent, comme toutes les guerres, boucheries et atrocités. En affirmant tout
cela, nous méditons sur ce que David oublia.
Petit pâtre qu’il était, insignifiant, anonyme, il
lui arriva de devenir un grand roi et il oublia qu’il n’était qu’un petit
pâtre. Il oublia, petit pâtre armé de sa fronde, que même si le frondeur est
adroit, c’est Dieu qui dirige la pierre. David oublia la reconnaissance, tout
comme il l’avait oubliée lorsqu’il ordonna le rapt de Bethsabée, femme d’Uri le
Hittite. . . David donc oublia le merci
de chaque jour, pour vouloir posséder encore plus. Et il oublia aussi ce
sentiment, qu’on a parfois appelé soumission, qui fait qu’on se tourne vers
Dieu, même dans des situations difficiles, même lorsque le vent nous est
contraire, en le priant ainsi : "Que ta volonté s’accomplisse…".
David oublia. Et pouvons-nous nous souvenir ?
Insistons : puis-je me souvenir ? de ce que Dieu a fait pour moi ? ou, à
défaut, de ce que je dois, profondément, réellement… à autrui ? La période que
nous vivons est propice à un exercice si l’on veut quotidien. Il existe une
longue chaîne humaine à laquelle j’ai dû, à laquelle je dois, d’être en vie
aujourd’hui, d’être nourri, d’avoir appris à lire, d’avoir connu le Christ
vivant, d’avoir rencontré des professeurs qui furent de bons maître, d’avoir
été guidé sûrement dans le choix d’un métier… et vous compléterez, vous
compléterez à l’infini. Mais cet exercice quotidien n’est pas la seule occasion
de se souvenir. Lorsque nous célébrons le culte, lorsque nous étudions les
Saintes Écritures, lorsque nous célébrons la Sainte Cène, lorsque nous prions, nous nous souvenons.
Nous nous souvenons des hauts faits de Dieu, et aussi, et surtout, de ceux qui,
parmi nos semblables, les auront fait advenir.
Par l’étude, par la méditation, et par la prière,
seuls, et en communauté, nous tâchons de ne pas oublier. Et c’est ainsi que
notre vie peut s’orienter vers la reconnaissance, pour ce qui fut, et pour ce
qui sera.
Pasteur Jean DIETZ, 13 mai 2020
Culte dominical : https://www.youtube.com/channel/UCLEihGwqDjzHjWjmYnP2_2Q
Offrande en ligne : https://www.eglise-protestante-unie.fr/vincennes-montreuil-p71320/don
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