dimanche 19 février 2017

La Parole de Dieu pour écouter, revenir, raconter (Jérémie 36)

Jérémie 36
1 En la quatrième année de Yoyaqim, fils de Josias, roi de Juda, la parole que voici s'adressa à Jérémie de la part du SEIGNEUR:
3 Peut-être les gens de Juda écouteront-ils tous les maux que je pense leur infliger, en sorte que, chacun revenant de son mauvais chemin, je puisse pardonner leurs crimes et leurs fautes.»4 Jérémie fit appel à Baruch, fils de Nériya, et celui-ci écrivit dans le rouleau, sous la dictée de Jérémie, toutes les paroles que le SEIGNEUR lui avait adressées.
5 Puis Jérémie demanda à Baruch: «J'ai un empêchement, je ne peux pas aller dans la maison du SEIGNEUR,
6 vas-y donc toi-même en un jour de jeûne et, dans la maison du SEIGNEUR, face au peuple, proclame les paroles du SEIGNEUR dans le rouleau où tu as écrit, sous ma dictée; proclame-le à tous les Judéens qui seront venus de leurs différentes villes.
7 Il se pourrait alors que leur supplication jaillisse devant le SEIGNEUR et que chacun revienne de son mauvais chemin, car terrible est la colère, la fureur que le SEIGNEUR manifeste à l'égard de ce peuple.»
8 Baruch, fils de Nériya, fit tout ce que le prophète Jérémie lui avait commandé; il proclama, dans la maison du SEIGNEUR, dans le livre, les paroles du SEIGNEUR.

9 En la cinquième année de Yoyaqim, fils de Josias, roi de Juda, au neuvième mois, on convoqua pour un jeûne devant le SEIGNEUR tous les gens de Jérusalem, et tous les gens des villes de Juda qui venaient à Jérusalem.
10 Alors Baruch proclama, dans le livre, les paroles de Jérémie, dans la maison du SEIGNEUR, dans la salle de Guemaryahou, fils de Shafân, le secrétaire, dans le parvis supérieur, à l'entrée de la porte Neuve du Temple; il le proclama à tout le peuple.
11 Or Mikayehou, fils de Guemaryahou, fils de Shafân, écouta toutes les paroles du SEIGNEUR telles qu'elles étaient écrites dans le livre.
12 Il descendit au palais, entra dans la salle du secrétaire; là étaient réunis en séance tous les ministres: le secrétaire Elishama, Delayahou, fils de Shemayahou, Elnatân, fils de Akbor, Guemaryahou, fils de Shafân, Sédécias, fils de Hananyahou, et les autres ministres.
13 Mikayehou leur raconta toutes les paroles qu'il avait écoutées quand Baruch, fils de Nériya, proclamait le livre au peuple.
14 Alors le conseil des ministres envoya Yehoudi, fils de Netanyahou, fils de Shèlèmyahou, fils de Koushi, auprès de Baruch pour lui dire: «Apporte-nous le rouleau que tu as proclamé devant le peuple.» Baruch, fils de Nériya, prit le rouleau et vint vers eux.
15 Ils lui dirent: «Assieds-toi et proclame-nous ce rouleau!» Baruch s'exécuta.

16 En écoutant toutes les paroles, ils furent tous pris d'une sainte panique. Finalement ils dirent à Baruch: «Nous ne manquerons pas de raconter au roi toutes ces paroles.»
17 Et ils lui demandèrent: «Raconte-nous comment tu as écrit toutes ces paroles sous sa dictée.»
18 Baruch leur répondit: «Il m'a dicté personnellement toutes ces paroles, tandis que moi, je les écrivais avec de l'encre dans le livre.»
19 Les ministres dirent à Baruch. «Va-t'en, cache-toi, et Jérémie aussi; que personne ne sache où vous êtes!»
20 Ayant déposé le rouleau dans la salle du secrétaire Elishama, ils entrèrent chez le roi, dans ses appartements privés, et ils racontèrent au roi tout ce qui s'était passé.
21 Alors le roi envoya Yehoudi chercher le rouleau; celui-ci alla le prendre dans la salle du secrétaire Elishama et le proclama au roi et à tous les ministres qui, debout, entouraient le roi.
22 Le roi, lui, était assis au salon d'hiver - c'était le neuvième mois - , et le feu d'un brasero brûlait devant lui.
23 Chaque fois que Yehoudi avait lu trois ou quatre colonnes, le roi les découpait avec un canif de scribe et les jetait au feu du brasero, si bien que tout le rouleau finit par disparaître dans le feu du brasero.
24 Ils ne furent pas pris de sainte panique, ils ne déchirèrent pas leurs vêtements, ni le roi ni aucun de ses serviteurs qui écoutaient toutes ces paroles.
25 Même quand Elnatân, Delayahou et Guemaryahou intervenaient auprès du roi pour l'empêcher de brûler le rouleau, celui-ci ne les écoutait pas,

26 et il donna l'ordre à Yerahméel, prince du sang, à Serayahou, fils de Azriël, et à Shèlèmyahou, fils de Avdéel, d'arrêter le secrétaire Baruch et le prophète Jérémie; mais le SEIGNEUR les tenait cachés.


Prédication : 
            Ainsi donc, comme nous le lisons, il advint un jour que, sous commandement divin, la parole de Dieu fut transcrite, et cette parole devint un livre.
            Alors, au lieu qu’elle soit prononcée par un homme particulièrement  inspiré au moment que Dieu choisirait, elle allait pouvoir être infiniment reproduite et lue par toute personne compétente. Savoir lire et écrire, cela se transmet d’homme à homme, ça s’apprend à l’école… mais l’esprit de Dieu, lui, souffle où il veut.
            En matière donc de transmission de la parole de Dieu, dans ce chapitre, la compétence vient l’emporter sur l’inspiration. Et ce que le prophète faisait, proclamer la parole de Dieu, un scribe le fera, puis un autre scribe après le premier, et ils recopieront le rouleau, à l’infini. Ainsi, même lorsque Dieu se sera tu à jamais et que les prophètes auront disparu, la parole de Dieu demeurera. 

            Mais la parole de Dieu, c’est pour quoi faire ? Il y a trois verbes qui sont répétés tout au long du texte : écouter, revenir, et raconter.

            La parole de Dieu, c’est fait pour écouter. Il y a toujours une ambiguïté entre écouter et entendre. Lorsque l’un de ces verbes signifie que ça entre par une oreille et que ça sorte par l’autre verbe signifie que, entrée par les oreilles, la parole produit un effet. Le parti pris de notre traduction, c’est de n’utiliser qu’un seul verbe : écouter.
            Et une chose est claire, ça entre par les oreilles et, s’agissant du peuple, ça ne produit apparemment rien. Cela signifie juste que, dans ce chapitre, les réactions collectives ne sont pas l’objet de la réflexion. Ça entre donc par les oreilles de tous, mais tous n’écoutent pas. Car écouter devrait produire quelque chose.

            Ce que ça devrait produire, c’est le deuxième verbe, et c’est revenir. L’écoute de la parole de Dieu devrait produire ceci : « que chacun revienne de son mauvais chemin ». Il est ici question de changer, de se convertir… dans une perspective toute individuelle.
La parole de Dieu a été proclamée aux oreilles de tout le peuple, elle est entrée dans les oreilles de chacun. Chacun a-t-il un mauvais chemin ? Lequel ? Le texte que nous méditons ne dit rien de cela… Que chacun donc de ceux qui écoutent s’examine, et revienne de son mauvais chemin, c'est-à-dire se corrige.
            Mais on peut en dire d’avantage sur ce qu’est un mauvais chemin. Certains ont écouté la parole, et ils ont réagi de manière appropriée, en mettant à l’abri la source de la parole, et en allant tout raconter fidèlement au roi. Ainsi, par une sorte de mouvement centripète et ascendant, cette parole va être proclamée jusque dans les oreilles du roi. Le roi est évidemment l’un de ces chacun dont on parle dès le début, mais sa responsabilité n’est peut-être pas tout à fait la même, n’a peut-être pas tout à fait le même poids que celle d’un anonyme au sein du peuple. Ce n’est pas faire de la haute théologie que de rappeler qu’un petit roi vassal comme Yoyaqim porte une responsabilité considérable s’il refuse de payer le tribut à son puissant suzerain… le peuple tout entier en pâtira. Qu’est-ce alors donc qu’un mauvais chemin ? C’est un choix qu’on fait, un acte qu’on commet, et dont les conséquences délétères sont payées par autrui, par plus faible que soi, par ceux qui ont mis en vous leur confiance. Et ainsi, chacun, au niveau qui est le sien, peut méditer sur « son mauvais chemin » et, écoutant la parole de Dieu, en revenir.  La parole de Dieu, c’est donc fait pour écouter, et pour revenir.

            La parole de Dieu, enfin, c’est fait pour raconter. C’est un verbe clé, un verbe très important, qui est peut-être même le plus petit « bon chemin » possible,  Raconter c'est, mot pour mot, relire et redire les paroles de la prophétie de Jérémie, donc restituer mot pour mot la parole de Dieu, pas moins, pas plus. Raconter, c’est, à la limite, juste remettre une Bible à un lecteur éventuel.
Il y a là une première conviction : la parole de Dieu écrite est perpétuellement actuelle. C’est un principe d’inspiration littérale. Et il faut ici, dans ce texte, le reconnaître comme tel. Le discuter sera pour une autre prédication.
Il y a là aussi une deuxième conviction : la parole de Dieu agit par elle-même en ceux qui choisissent de l’écouter. Qu’ils reviennent de leurs mauvais chemins, tant mieux, mais ce que sont ou furent leurs mauvais chemin n’est guère intéressant et, d’ailleurs, notre chapitre n’en parle même pas et puis, dans l’histoire de l’humanité, les mauvais chemins sont à peu près les mêmes pour tous. Ceci dit, ce qui est ici commandé n’est pas que quelqu’un rende témoignage de la transformation de sa misérable vie ; ce qui est commandé, c’est de raconter, rapporter mot pour mot, lettre pour lettre, la parole de Dieu.
Puisse-t-elle alors, cette parole de Dieu, être écoutée.

            Et on est ramené ainsi à ce par quoi l’on avait commencé, l’impératif d’écouter. Certains écouteront, d’autres pas. Certains écouteront et reviendront, d’autres ne reviendront pas de leurs mauvais chemins… Mais la parole sera recopiée et recopiée encore, racontée et racontée encore…
Et qui sait si, un jour, ceux qui n’écoutaient pas écouteront, et qui sait si, un jour, ceux qui ne revenaient pas reviendront de leurs mauvais chemins ?
Dieu seul le sait, et Lui seul connaît ceux qui lui appartiennent.

            Nous ne faisons ici pas grand-chose d’autre que ce que fit le scribe Baruch. Lire la parole de Dieu, écouter la parole de Dieu, revenir peut-être de nos mauvais chemins – et cela appartient à notre intimité – et raconter la parole de Dieu.
            Puissions-nous le faire toujours. Amen