mercredi 13 mai 2020

Lettre pastorale du 13 mai 2020. Pour ne pas oublier




Pour ne pas oublier

Lorsque David fut devenu vieux, il ne quittait plus son palais. Le grand roi qu’il était ne guerroyait plus, d’autres le faisaient en son nom et pour lui. Il vint à David l’idée de recenser tout son peuple. Le récit de ce recensement, et de ce qui s’ensuivit, figure en 2 Samuel 24 et en 1 Chroniques 21. A l’origine de cette idée, Dieu lui-même, ou Satan, cela dépend des auteurs. N’imaginez pas que furent comptés femmes, enfants et vieillards. Seuls les hommes en âge de tirer l’épée furent dénombrés. Les deux récits convergent vers des chiffres astronomiques, centaines de milliers, au-delà même du million !
Ces résultats sont historiquement invraisemblables, mais ils ont une valeur symbolique. La richesse et la prospérité du royaume étaient considérables. Si considérable qu’un dénombrement était évidemment inutile. Et quand bien même il eût fallu lever une armée, David ne pouvait pas ignorer que Dieu lui avait donné la victoire, alors qu’il était tout seul face à un certain Goliath, géant philistin…
Lorsque David fut devenu vieux, il eut un moment de faiblesse qui lui fit oublier Dieu, qui lui fit perdre la foi. David oublia donc que le trône sur lequel il était assis n’était pas le trône de David mais le trône de Dieu, que le peuple n’était pas les sujets de David mais le peuple de Dieu, et que les guerres qu’il avait menées n’étaient pas guerres de David, mais les guerres de Dieu. En affirmant  cela, nous ne légitimons en aucun cas ce que furent évidemment ces guerres ; conquêtes territoriales durables ou razzias saisonnières, elles furent, comme toutes les guerres, boucheries et atrocités. En affirmant tout cela, nous méditons sur ce que David oublia.
Petit pâtre qu’il était, insignifiant, anonyme, il lui arriva de devenir un grand roi et il oublia qu’il n’était qu’un petit pâtre. Il oublia, petit pâtre armé de sa fronde, que même si le frondeur est adroit, c’est Dieu qui dirige la pierre. David oublia la reconnaissance, tout comme il l’avait oubliée lorsqu’il ordonna le rapt de Bethsabée, femme d’Uri le Hittite. . .  David donc oublia le merci de chaque jour, pour vouloir posséder encore plus. Et il oublia aussi ce sentiment, qu’on a parfois appelé soumission, qui fait qu’on se tourne vers Dieu, même dans des situations difficiles, même lorsque le vent nous est contraire, en le priant ainsi : "Que ta volonté s’accomplisse…".
David oublia. Et pouvons-nous nous souvenir ? Insistons : puis-je me souvenir ? de ce que Dieu a fait pour moi ? ou, à défaut, de ce que je dois, profondément, réellement… à autrui ? La période que nous vivons est propice à un exercice si l’on veut quotidien. Il existe une longue chaîne humaine à laquelle j’ai dû, à laquelle je dois, d’être en vie aujourd’hui, d’être nourri, d’avoir appris à lire, d’avoir connu le Christ vivant, d’avoir rencontré des professeurs qui furent de bons maître, d’avoir été guidé sûrement dans le choix d’un métier… et vous compléterez, vous compléterez à l’infini. Mais cet exercice quotidien n’est pas la seule occasion de se souvenir. Lorsque nous célébrons le culte, lorsque nous étudions les Saintes Écritures, lorsque nous célébrons la Sainte Cène,  lorsque nous prions, nous nous souvenons. Nous nous souvenons des hauts faits de Dieu, et aussi, et surtout, de ceux qui, parmi nos semblables, les auront fait advenir.
Par l’étude, par la méditation, et par la prière, seuls, et en communauté, nous tâchons de ne pas oublier. Et c’est ainsi que notre vie peut s’orienter vers la reconnaissance, pour ce qui fut, et pour ce qui sera.

Pasteur Jean DIETZ, 13 mai 2020





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