Je me souviens de la Loi n°.99-944,
une loi de la République française, promulguée le 15 novembre 1999. C’est cette
loi qui rendait possible le PACS. Je me souviens aussi de Lothar et Martin,
deux ouragans qui traversèrent la France les 26, 27 et 28 décembre 1999. Six
semaines séparent les deux événements… Y a-t-il un lien entre ces deux
événements ? Je pense que vous répondrez négativement.
Voici donc un troisième souvenir.
Dans les premiers jours de janvier 2000, j’ai reçu dans mon bureau quelqu’un
qui était venu m’expliquer que les tempêtes de fin décembre 1999 étaient la
punition de Dieu contre la France, pour avoir légalisé l’homosexualité. J’ai
d’abord demandé à cette personne de m’expliquer de quoi pourrait bien être
coupable devant Dieu un bébé qui, avec ses parents, des parents chrétiens,
aurait été écrasé par un arbre déraciné par la tempête. Divers bredouillements
sont venus, qui m’ont agacé. Alors j’ai flanqué cette personne à la porte de
mon bureau, en lui donnant l’ordre de méditer sur mes propos et en lui
interdisant l’accès à mon bureau tant elle ne serait pas dans des dispositions plus
charitables… en quelque manière, donc, j’ai puni cette personne, tant il est
vrai que, parfois, la charité chrétienne n’a rien d’autre à donner que des
coups de pied aux fesses.
Ces trois souvenirs pour nourrir
un peu la question : Dieu nous punit-il ?
Je ne veux pas d’emblée ouvrir la
Bible pour répondre à une telle question. Il ne le faut pas… j’ai même envie de
dire qu’il ne faut jamais ouvrir la Bible aux fins de répondre d’emblée à une
question sérieuse.
Se demander si Dieu nous punit,
c’est s’interroger au moins à trois titres :
C’est se demander s’il y a un
lien entre ce qui pourrait être une faute, qui est éventuellement une faute, et
ce qui vient ensuite dans la vie. Je n’ai pas respecté la priorité à droite, et
ma voiture est hors service ; mais dirais-je ceci si ma voiture est hors
service, panne de démarreur, trois semaines après ledit refus de
priorité ?
C’est se demander si Dieu tient
compte de nos fautes et intervient dans nos vies à leur suite. Confère
l’exemple par lequel commence cette méditation ; mais on peut aussi, pas
loin du même registre, se souvenir de ce temps où l’on a entendu que le SIDA
était une punition divine… les enfants hémophiles et morts du SIDA après avoir
été transfusés par du sang contaminé, Dieu les a punis de quoi ?
C’est se demander si Dieu punit
individuellement ou collectivement des fautes individuelles ; c’est se
demander si la notion de faute collective existe…
C’est se demander où l’on peut
apprendre que Dieu nous punit.
Mais, en attendant de répondre à toutes
ces questions, quelqu’un demande : Dieu nous punit-il ? Pour poser
une telle question, il faut deux conditions, au moins :
Quelqu’un vous a suggéré que Dieu
punit ; vous avez ça dans la tête et ça vous revient dans telle et telle
circonstances ; ou encore quelqu’un vous interroge – j’y viendrai avec un
autre souvenir.
Vous vous interrogez au sujet de
cette affirmation ; il vous apparaît même peut-être urgent de pouvoir
donner une réponse.
La question de départ ayant été
suffisamment déployée, peut-être est-il possible d’ouvrir la Bible. Mais de
l’ouvrir à quelle page, et dans quelle traduction ? Parce que, suivant la
traduction que vous lirez, les chances de répondre que « Oui, Dieu
nous punit. » ou de répondre que « Non, Dieu ne nous punit pas. »
ne sont pas du tout les mêmes. Vos risques d’être puni, ou châtié, par Dieu, sont
bien plus grande si vous êtes lecteurs de la traduction Segond 1910 que si vous
êtes lecteurs de la traduction Darby…
Ce qui apparaît dans toutes les
traductions que j’ai lues, c’est que bien des auteurs bibliques s’interrogent
sur les origines des bonheurs et des tribulations d’Israël, et qu’ils affirment
que Dieu n’est pas étranger à tout cela. Suivant les auteurs, et selon les
préjugés des traducteurs, l’image de Dieu sera plus ou moins l’image d’un père
qui éduque, qui éduque par la persuasion ou par la trique, ou l’image d’un
surveillant qui récompense ou qui punit, et qui le fait d’une manière strictement
individuelle (chacun paie pour ses propres fautes), ou bien
transgénérationnelle (les fautes des pères punies sur les fils), ou bien par
substitution (la piété du roi ou des princes bénéficie à tout le peuple, la
faute du roi est punie sur tout le peuple), etc.
Lorsqu’on se met à mêler le nom
de Dieu aux hasards de l’histoire, tout se complique, rien n’est simple, l’idiotie
patente et la monstruosité jamais impossibles. Exemple : le roi Josias.
Josias est précédé par deux rois, Manassé et Amôn, dont on retient qu’ils
firent « ce qui est mal aux yeux du Seigneur », en conséquence de
quoi, dit le Seigneur, « Je vais amener sur Jérusalem et sur Juda un
malheur tel que les deux oreilles tinteront à quiconque l’apprendra,
etc. » (2 Rois 21). Puis vient Josias, qui devient roi à l’âge de 8
ans ; « il fit ce qui est droit aux yeux de l’Eternel, et suivit
exactement le chemin de David, son père, sans dévier ni à droite ni à
gauche. » (2 Rois 22) Josias restaure et purifie le Temple, détruit les
hauts-lieux, remet en vigueur la Loi, la Pâque, détruit toutes sortes de dieux
étrangers, extermine les nécromanciens, etc. Vous vous dites, récompense pour
Josias… hélas, il meurt pitoyablement dans une escarmouche contre le pharaon
Neko. Justification théologique de cela ? « L’Eternel ne revint pas
de l’ardeur de la grande colère qui l’avait enflammé contre Juda, à cause de
toutes les offenses que Manassé avait commises contre lui. » (2 Rois 23).
Hum…
Conclusion, l’homme exemplaire
est puni pour les fautes de ses prédécesseurs. Une théologie de la rétribution ne
recule jamais devant cela… les pieux exilés de Babylone, car il y en eut,
auront apprécié l’endurcissement de leur Dieu, ou le caractère obtus de ceux
qui leur parlaient de Dieu... Certains d’entre eux se seront sans doute dit
déjà que de ce que quelqu’un confesse personnellement de Dieu on ne peut, ni ne
doit, jamais, inférer quoi que ce soit qui serait un savoir sur Dieu.
Dieu merci, toute la Bible n’est
pas construite autour de théologies de la rétribution. Voici tout autre chose :
Jérémie 31
29 En ce temps-là (dans cette perspective-là), on ne dit plus: «Les pères ont mangé du raisin vert et ce sont les
enfants qui en ont les dents rongées!»
30 Mais non! Chacun meurt
pour son propre péché, et si quelqu'un mange du raisin vert, ses propres dents
en seront rongées.
31 Des jours viennent - oracle du SEIGNEUR - où je conclus avec la communauté d'Israël - et
la communauté de Juda - une nouvelle alliance.
32 Elle est
différente de l'alliance que j'ai conclue avec leurs pères quand je les ai pris
par la main pour les faire sortir du pays d'Égypte. Eux, ils rompent mon alliance; mais moi, je reste
le maître chez eux - oracle du SEIGNEUR.
33 Voici donc l'alliance que je conclus avec la communauté d'Israël après ces jours-là - oracle du
SEIGNEUR: je dépose mes directives au
fond d'eux-mêmes, les inscrivant dans leur être; je deviens Dieu pour eux, et eux, ils deviennent un peuple pour moi.
34 Ils ne s’instruisent
plus entre compagnons, entre frères, répétant: «Apprenez à connaître le
SEIGNEUR», car ils me connaissent
tous, petits et grands - oracle du SEIGNEUR. Je pardonne leur crime; leur
faute, je n'en parle plus.
Avec tous les verbes mis au présent, et rien n’interdit
de les mettre tous au présent, c’est une perspective toute nouvelle qui
apparaît, d’une part, celle de la responsabilité personnelle ; et, devant
l’histoire de l’exil, plus encore qu’une nouvelle perspective, c’est de
l’espérance pour les innocents, et aussi pour certains coupables… pourvu bien
entendu qu’ils fassent ce que nous faisons depuis un certain temps :
interroger.
Reste cependant la question que quelqu’un pose personnellement.
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Monsieur l’Aumônier, Dieu nous punit-il ?
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Que voulez-vous me dire, Madame ?
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On m’a appris depuis que je suis petite fille que Dieu
récompense les bons et punit les méchants.
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Oui…
-
J’ai été bonne, Monsieur l’Aumônier. Je n’ai aimé que mon
mari, j’ai bien élevé mes enfants, j’ai prié tous les jours et j’ai été à la
messe, jamais sans me confesser. J’ai tout bien fait, vous savez, Monsieur
l’Aumônier, rien de mal, jamais.
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Je vous crois, Madame.
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Alors de quoi Dieu me punit-il avec ce cancer ?
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Il ne vous punit de rien, Madame…
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…
-
Que pensez-vous de ce qu’on vous appris ?
-
Des conneries, Monsieur l’Aumônier… ne le prenez pas mal…
des conneries.
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En effet…
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Peut-être que ça n’est pas trop tard pour recommencer…
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Ça n’est pas trop tard, Madame. Il n’est jamais trop tard
pour ça.
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