Actes 13
14 Et eux, étant partis de Perge, traversèrent le pays et
arrivèrent à Antioche de Pisidie; et étant entrés dans la synagogue le jour du
sabbat, ils s'assirent.
15 Et après la lecture de
la loi et des prophètes, les chefs de la synagogue leur envoyèrent dire: Hommes
frères, si vous avez quelque parole d'exhortation pour le peuple, parlez.
16 Et Paul, s'étant levé
et ayant fait signe de la main, dit: Hommes israélites, et vous qui craignez
Dieu, écoutez:
17 Le Dieu de ce peuple
choisit nos pères et éleva haut le peuple pendant son séjour au pays d'Égypte;
et il les en fit sortir à bras élevé.
26 Hommes frères, fils de la race d'Abraham, à vous et à
ceux qui parmi vous craignent Dieu, la parole de ce salut est envoyée;
27 car ceux qui habitent
à Jérusalem et leurs chefs, n'ayant pas connu Jésus, ni les voix des
prophètes qui se lisent chaque sabbat, ont accompli celles-ci en le jugeant.
28 Et quoiqu'ils ne
trouvassent en lui aucun crime qui fût digne de mort, ils
prièrent Pilate de le faire mourir.
29 Et après qu'ils eurent
accompli toutes les choses qui sont écrites de lui, ils le descendirent du bois
et le mirent dans un sépulcre.
30 Mais Dieu l'a
ressuscité d'entre les morts.
31 Et il a été vu pendant
plusieurs jours par ceux qui étaient montés avec lui de la Galilée à Jérusalem,
qui sont maintenant ses témoins auprès du peuple.
32 Et nous, nous vous
annonçons la bonne nouvelle quant à la promesse qui a été faite aux pères,
33 que Dieu l'a accomplie
envers nous, leurs enfants, ayant suscité Jésus; comme aussi il est écrit dans
le psaume second: "Tu es mon Fils, moi je t'ai aujourd'hui engendré".
42 Et comme ils sortaient, ils demandèrent que ces paroles
leur fussent annoncées le sabbat suivant.
43 Et la synagogue
s'étant dissoute, plusieurs des Juifs et des prosélytes qui servaient Dieu suivirent
Paul et Barnabas, qui leur parlant, les exhortaient à persévérer dans la grâce
de Dieu.
44 Et le sabbat suivant, presque toute la ville fut
assemblée pour entendre la parole de Dieu;
45 mais les Juifs, voyant
les foules, débordèrent de jalousie
et (vinrent) contredire en blasphémant ce que Paul disait.
46 Alors Paul et Barnabas y
allèrent franchement et dirent: C'était à vous premièrement qu'il fallait
annoncer la parole de Dieu; mais puisque vous la rejetez, et que vous vous
jugez vous-mêmes indignes de la vie éternelle, voici, nous nous tournons vers
les nations,
47 car le Seigneur nous a
commandé ainsi: "Je t'ai établi pour être la lumière des nations, afin que
tu sois en salut jusqu'au bout de la terre".
48 Et lorsque ceux des
nations entendirent cela, ils s'en réjouirent, et ils glorifièrent la parole du
Seigneur; et tous ceux qui étaient destinés à la vie éternelle crurent. 49
Et la parole du Seigneur se répandait par tout le pays.
50 Mais les Juifs
excitèrent les femmes de qualité qui servaient Dieu et les principaux de
la ville; et ils suscitèrent une persécution contre Paul et Barnabas, et les
chassèrent de leur territoire.
51 Mais eux, ayant secoué
contre eux la poussière de leurs pieds, s'en vinrent à Iconium.
52 Et les disciples
étaient remplis de joie et de l'Esprit Saint.
Prédication :
De ce 13ème chapitre des Actes des Apôtres je
voudrais vous dire que cela fait plus d’une semaine déjà qu’il est bien présent
sur ma table de travail. Il a été l’occasion d’une étude biblique, et sera au
programme d’une seconde étude biblique ; il a été l’occasion d’une
méditation lors de la dernière séance du Conseil presbytéral, et le voici
encore – et je pense que les questions qui sont posées dans ce chapitre
resteront encore en suspens. Quelles sont ces questions ? Les principales
questions sont ici au nombre de trois. Voici la première : les juifs
sont-ils exclus de la promesse de la vie éternelle ? Voici la
seconde : les nations sont-elles, si elles ne se tournent pas vers Jésus
Christ, exclues de la promesse de la vie éternelle ? La troisième : les
nations qui, depuis la nuit des temps, n’ont pas eu l’occasion de connaître le
salut en Jésus Christ, sont-elles exclues de la promesse de la vie
éternelle ? Pourquoi ces trois questions ? Il est écrit, parole de
l’apôtre Paul s’adressant à des détracteurs juifs devant presque toute la ville
d’Antioche de Pisidie : « C’est à vous d’abord que devait être adressée la
Parole de Dieu, et maintenant, vous la rejetez et vous vous condamnez
vous-mêmes comme indignes de la vie éternelle, nous nous tournons vers les nations. »
Qui sont les nations ? On les appelle aussi parfois
les païens. On dit que ce sont tous ceux qui ne sont pas juifs. Mais dans notre
texte, c’est juste un peu plus complexe que cela. Tout au long du chapitre 13
des Actes des Apôtres, il s’ébauche une sorte d’organisation
concentrique : au centre, les “juifs”, entendons par là des gens nés et
éduqués dans la foi d’Israël (simplification considérable, dont nous pouvons
nous contenter) ; autour, des ‘prosélytes’, des gens d’origines diverses
ayant embrassé la foi d’Israël, puis des ‘adorateurs de Dieu’ (participent au
culte de la synagogue), des ‘craignant Dieu’, puis des ‘païens ou nations’ (des
gens de toutes sortes d’origines ethniques qui sont sur le seuil de la
synagogue, mais pas vraiment dedans) et enfin les ‘extrémités de la terre’ (à
ce niveau, nous pouvons penser qu’ils ne connaissent absolument rien de ce qui
se fait et se dit dans le culte pratiqué dans les synagogues, les patriarches,
l’exode, etc.).
Qui sont les nations, ou les païens, vers lesquels vont
se tourner Paul et Barnabas ? Ceux qui sont sur le seuil de la synagogue,
de toutes origines ethniques possibles. Ou, plus loin, ceux qui sont aux
extrémités de la terre, qu’on appelle aussi les nations, qui n’auront jamais
entendu parler de Dieu, ni du Fils de Dieu, ni de Moïse et de la Loi, ni des
Prophètes... Voici trois remarques sur les nations.
Les nations (1)
Dans la logique du texte, Actes 13, à Antioche de Pisidie, en plein cœur de
l’Anatolie, ceux qui sont désignés par le mot nations sont d’abord de ces gens qui sont sur le seuil de la
synagogue, qui écoutent le message, qui ont semble-t-il un intérêt pour cette
religion qui se présente comme fort ancienne. Ils ne dépassent pas le seuil, et
ne sont pas tellement invités à le faire. Sans doute parce que ce sont des gens
simples, nombreux, pauvres, et que la synagogue du lieu choisit bien ses
membres, femmes riches et notables de la ville. Cette religion est certes accueillante,
mais nous voyons qu’elle est une religion d’élite, religion pour l’élite.
Mais la parole de Dieu proclamée par Paul et Barnabas est-elle réservée à
une certaine élite ? Nous répondons que non, que le message est pour tous,
que la promesse est pour tous, qu’une communauté qui trierait ses membres en
considérant leur notabilité et leurs revenus ne serait guère cohérente avec ce
qu’elle enseigne et adore.
Quoi qu’il en soit, lorsque Paul déclare solennellement que Barnabas et
lui-même vont désormais se consacrer aux nations (aux païens), ces gens-là,
ceux du seuil, voire du dehors, se réjouissent et glorifient la parole de Dieu.
Ils la glorifient par des cris de joies qui en l’espèce ont dû être des
éléments de liturgie repris spontanément, collectivement et bruyamment, et
aussi – et surtout – ils glorifient la parole de Dieu par leur adhésion.
Ce que nous venons de dire traite le cas de païens qui, étant aux portes de
la synagogue, avaient déjà une petite connaissance des mots, faits et gestes,
lois et coutumes, des fils d’Israël et de leur Dieu. La parole de Dieu sous la
forme du message de Paul et Barnabas, leur était donc un peu intelligible.
Les nations (2) Mais qu’en
est-il lorsque, le sabbat suivant, presque toute la ville se rassemble, ou
encore lorsque la parole du Seigneur gagne toute la contrée (v.49) ? Le
message demeure-t-il intelligible, est-il intelligible pour chacun et dès une
première audition ? Nous penchons pour une réponse positive.
D’abord nous dirons qu’une personne humaine n’est pas, n’est jamais un
sujet coupé de tous les autres. C’est parce que les gens en parlent à d’autres
que d’autres en entendent parler. Nous allons aussi dire que le contexte du 1er siècle
de notre ère était propice pour une expansion rapide du message. Un monde pétri
par les religions, une vie dure pour les humains, une espérance de vie basse,
des millions d’esclaves, un monde brutal ; si dans ce monde vous annoncez
sans vous faire payer un Dieu qui pardonne gratuitement, à cause du sacrifice
d’un homme, son Fils, mort et ressuscité, que ce Dieu n’exige pas de ces sacrifices
prompt à enrichir des prêtres, et qu’il promet la vie éternelle à tous, même
aux femmes, mêmes aux esclaves et même aux femmes esclaves, alors vous êtes
bien accueilli.
Car le message est simple, clair et approprié, il est en somme intelligible.
Et si la religion que vous enseignez n’a besoin ni d’un discours complexe, ni
de rituels formidables, ni d’une moralité très supérieure, vous avez du succès.
Et vous aurez – et les apôtres ont eu – du succès, au moins dans tout l’empire
romain, tout autour de la Méditerranée, c'est-à-dire jusqu’aux extrémités de la
terre.
Les nations (3) Et au-delà des extrémités de la terre ? Bien
plus loin, bien plus tard. Par exemple au sud de l’Amérique du sud, en Terre de
Feu, et dans les canaux de Patagonie.
Je ne sais pas si vous situez qui est Jean RASPAIL (1925-…), écrivain
français qui a écrit justement sur les Fuégiens (Onas, Yamanas, Alakalufs).
Dans un de ses ouvrages, un roman ethnographique (Qui se souvient des hommes me semble-t-il, 1986) il raconte
que lorsque les premiers occidentaux descendirent de leurs navires et
entrèrent en contact avec ces ethnies, ils débarquèrent avec un crucifix monumental
qu’ils plantèrent là en haut de la place. Les Fuégiens se dirent : “Si
c’est ainsi qu’ils traitent leurs ennemis, nous avons intérêt à nous tenir à
carreau.” Mais lorsque les nouveaux arrivants leur expliquèrent que cet homme,
sanguinolent, agonisant, cloué sur une croix, était leur meilleur ami, leur
maître, leur sauveur, les autochtones pensèrent que ces nouveaux arrivants
étaient fourbes et qu’on ne pourrait certainement pas leur faire confiance. Le
message chrétien ainsi délivré était à cet endroit totalement inintelligible. Je ne garantis pas
la précision de la citation, mais l’esprit y est. Ces peuples ont été
découverts au 16ème siècle, mais laissés relativement en paix jusqu’à
la colonisation effective de leur pays, au début du 20ème siècle. Lorsque
le message chrétien, en même temps que la présence de colons, a été imposé à ces
peuples par des missionnaires, ces peuples déjà fort peu nombreux mais qui
vivaient là comme à l’âge de pierre, ont connu le sort funeste de l’extinction,
et se sont perdus aussi leur culture et leurs dieux.
Nous n’entendons pas ici faire le procès de l’occident chrétien, nous en
sommes les fils et les filles et nul ne peut dire ce qu’il aurait fait ni ce
qui aurait dû être fait. Mais notre situation aujourd’hui, situation de
disciples et de témoins de Jésus Christ est semblable en bien des manières à la
situation de ceux qui débarquèrent en Terre de Feu. Nos interlocuteurs sont,
pour la plupart, devenus presque totalement, et même pour certains totalement,
ignorants de ce qui se dit, de ce qui se fait, de ce qui se pense en religion.
Ils n’entendent parler que des religieux radicaux, arrogants dans leurs propos
et violents dans leurs actes. Au point que la parole du Seigneur est devenue
presque, voire totalement, inintelligible.
Nous n’y pouvons pas grand-chose. Mais il y a plusieurs choses tout de même
que nous pouvons faire. A commencer – et nous sommes en train de le faire – par
méditer sur cette situations qui est la nôtre. Ensuite, nous devons répondre de
notre foi, avec les mots du monde et selon les besoins du monde, et en répondre
aussi dans le langage de notre tradition. Nous pouvons encore – finalement et
surtout – garder confiance en Dieu.
Il est écrit que la parole du Seigneur gagnait toute la contrée. Il est
certain qu’elle allait plus vite et plus loin que les prédicateurs itinérants,
et que, bien souvent, elle était même là avant eux.
Rendons gloire à Dieu. Amen
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