dimanche 25 décembre 2016

La foi seule (Luc 2, et Jean 1) ou prenez soin du Sauveur !

Luc 2
1 Or, en ce temps-là, parut un décret de César Auguste pour faire recenser le monde entier.
2 Ce premier recensement eut lieu à l'époque où Quirinius était gouverneur de Syrie.
3 Tous allaient se faire recenser, chacun dans sa propre ville;
4 Joseph aussi monta de la ville de Nazareth en Galilée à la ville de David qui s'appelle Bethléem en Judée, parce qu'il était de la famille et de la descendance de David,
5 pour se faire recenser avec Marie son épouse, qui était enceinte.
6 Or, pendant qu'ils étaient là, le jour où elle devait accoucher arriva;
7 elle accoucha de son fils premier-né, l'emmaillota et le déposa dans une mangeoire, parce qu'il n'y avait pas de place pour eux dans la salle d'hôtes.
8 Il y avait dans le même pays des bergers qui vivaient aux champs et montaient la garde pendant la nuit auprès de leur troupeau.
9 Un ange du Seigneur se présenta devant eux, la gloire du Seigneur les enveloppa de lumière et ils furent saisis d'une grande crainte.
10 L'ange leur dit: «Soyez sans crainte, car voici, je viens vous annoncer une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple:
11 Il vous est né aujourd'hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur;
12 et voici le signe qui vous est donné: vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire.»
13 Tout à coup il y eut avec l'ange l'armée céleste en masse qui chantait les louanges de Dieu et disait:
14 «Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix pour ses bien-aimés.»
15 Or, quand les anges les eurent quittés pour le ciel, les bergers se dirent entre eux: «Allons donc jusqu'à Bethléem et voyons ce qui est arrivé, ce que le Seigneur nous a fait connaître.»
16 Ils y allèrent en hâte et trouvèrent Marie, Joseph et le nouveau-né couché dans la mangeoire.
17 Après avoir vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit au sujet de cet enfant.
18 Et tous ceux qui les entendirent furent étonnés de ce que leur disaient les bergers.
19 Quant à Marie, elle retenait tous ces événements en en cherchant le sens.

20 Puis les bergers s'en retournèrent, chantant la gloire et les louanges de Dieu pour tout ce qu'ils avaient entendu et vu, en accord avec ce qui leur avait été annoncé.

Jean 1
1 Au commencement était le Verbe, et le Verbe était dans l’intimité de Dieu,
et le Verbe était Dieu.  2 Il était au commencement dans l’intimité de Dieu.

3 Tout fut par lui, et rien de ce qui fut, ne fut sans lui.
4 En lui était la vie et la vie était la lumière des hommes,
5 et la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l'ont point comprise.
6 Il y eut un homme, envoyé de Dieu: son nom était Jean.
7 Il vint en témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui.
8 Il n'était pas la lumière, mais il devait rendre témoignage à la lumière.
9 Le Verbe était la vraie lumière qui, en venant dans le monde, illumine tout homme.
10 Il était dans le monde, et le monde fut par lui, et le monde ne l'a pas reconnu.
11 Il est venu chez lui, et les siens ne l'ont pas pleinement reçu.
C'est mon dernier post de l'année 2016. In memoriam.
12 Mais à ceux qui l'ont reçu, à ceux qui croient en son nom, il a donné possibilité de devenir enfants de Dieu.
13 Ceux-là ne sont pas nés du sang, ni d'un vouloir de chair, ni d'un vouloir d'homme, mais de Dieu.

14 Et le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous et nous avons vu sa gloire, cette gloire que, unique engendré, plein de grâce et de vérité, il tient du Père.
15 Jean lui rend témoignage et proclame: «Voici celui dont j'ai dit: après moi vient un homme qui m'a devancé, parce que, avant moi, il était.»
16 De sa plénitude en effet, tous, nous avons reçu, et grâce sur grâce.
17 Si la Loi fut donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.
18 Personne n'a jamais vu Dieu; Dieu unique engendré, qui est dans le sein du Père, s’en est fait l’interprète.

Prédication
Dans l’évangile de Luc, comme nous l’avons lu, merveilleusement, le ciel s’ouvre, apparaissent l’ange, puis la foule des armées célestes et, une fois qu’a été annoncé ce qui devait être annoncé, le ciel se referme sur son propre mystère.
Alors les humains sont ici-bas, le ciel et Dieu sont tout là-haut, éloignés infiniment l’un de l’autre, et chacun ne peut être que là où il est, et nulle part ailleurs. Pourtant, dans cette configuration, le ciel qui s’est un jour ouvert pourrait bien s’ouvrir encore…
L’espérance prend ici une forme merveilleuse : dans une situation compromise, le ciel peut de nouveau s’ouvrir et les anges intervenir une fois encore.

Différente est la perspective de l’évangile de Jean : le Verbe se fait chair. Entendons bien ceci d’une manière radicale. S’étant fait chair, il n’est plus Verbe, mais chair ; il n’est plus là-haut, mais ici-bas. Le Verbe s’est anéanti en tant que Verbe et il n’y a plus que la chair, que de l’humain.
Alors l’espérance ne peut plus être celle d’un ciel qui s’ouvre. L’espérance ne tient plus qu’à la vertu des humains : probité, vérité et amour.

On peut se demander alors qui accepte ce cadre si particulier de l’évangile de Jean, ou encore qui veut de cette forme radicalement incarnée de l’espérance ? Qui surtout parmi les croyants ? On en entend bien souvent affirmer par des croyants que l’incroyance est l’autoroute du chaos et du désespoir. Ou encore affirmer que si finalement Dieu n’existe pas, ce que font les croyants – prier, étudier, servir – n’a aucun sens… A ceci nous avons à répondre que la foi dont ont parlé les Prophètes, dont a parlé Jésus lorsqu’il parlait en tant que prophète, est bien la foi seule, celle-là même dont a parlé aussi Martin Luther.
Et il faut bien entendre ici que le propre de la foi seule est qu’elle est seule. C'est-à-dire que celui qui croit authentiquement est seul à croire. Ainsi celui qui croit, lorsque sa foi est réellement foi seule, croit, ne peut que croire ici-bas, dans la chair, sans aucunement présupposer l’existence de Dieu, et sans présupposer non plus – et encore moins – que Dieu s’intéresse à lui. Si l’on a bien compris ce qu’a voulu dire l’évangile de Jean en disant que le Verbe s’est fait chair, c’est justement lorsque la foi est seule qu’elle est foi en Dieu.

Qui veut, qui voudra de cette radicalité de la foi ? L’évangile de Jean, qui parle si bien de la foi seule, énonce clairement que les humains ne veulent pas, ne veulent absolument pas de cette foi seule. Nous lisons : « Il est venu chez lui… et les siens ne l’ont pas pleinement reçu ». Le recevoir pleinement, c’eût été croire, comme nous l’avons dit, croire seulement, vivre de la foi et de la foi seule. Et cela n’advint pas… quelques-uns le reçurent, disons, ses disciples. On peut dire qu’ils le reçurent un peu, ils crurent pour ce dont ils étaient capables de croire. Ils commencèrent ce qu’on peut appeler l’apprentissage de la foi. Et lorsqu’au sujet de ceux-ci l’évangile de Jean écrit qu’il leur a été donnée la possibilité de devenir enfants de Dieu, nous devons entendre que c’est le verbe devenir qui porte l’essentiel du message. Il n’est d’enfant de Dieu qu’en devenir, et il n’est de foi qu’apprentissage de la foi.

Ainsi, de cet apprentissage, et du chemin qu’il a déjà parcouru,  celui qui croit ne saurait se prévaloir sans que sa foi ne soit plus apprentissage de la foi seule. C’est pour bien marquer cela que Jean précise encore que ce n’est jamais d’un vouloir de chair, ni d’un vouloir d’homme que cela est issu, mais seulement de Dieu.

Aujourd’hui c’est Noël. En revenant à l’évangile de Luc, nous nous penchons sur un nouveau né. Un nouveau né serait le Christ Seigneur ? Car c’est bien un nouveau né que nous voyons. Il est Sauveur aussi. Il apporte le salut… quel salut ? Il s’agit d’être sauvé de l’idée qu’on peut soit même faire son propre salut. Devant la crèche, ce qui saute aux yeux, c’est que le salut d’autrui importe toujours d’avantage au croyant que le sien propre. Pour l’heure le sauveur est un nouveau né et, parce que c’est un nouveau né, c’est lui qui a besoin de nous, sinon, comme tout nouveau né, il périra. Ainsi, Noël est porteur d’un message particulièrement précieux : si vous ne prêtez pas attention au sauveur, si vous ne prenez pas soin de lui, et disons, si vous ne sauvez pas le sauveur, il n’y aura de salut pour personne. Noël requiert ici du croyant un engagement fort, voire essentiel. Et cet engagement ressort encore de la foi seule. Le Sauveur c’est lui, c’était et ce sera toujours lui, et ce n’est pas nous. Prendre soin de celui dont on a tout à recevoir, c’est notre lot, et c’est notre grâce. La grâce faite à ceux qui apprennent à croire.

Puissions-nous apprendre à croire. Puissions-nous être trouvés croyants. Amen