Mais pas seulement un verset de Matthieu, comme on va le voir, et, surtout pas directement un prédication, mais une méditation donnée lors de l'ouverture d'une session de conseil presbytéral.
Deutéronome 15
14 Oui, la parole est toute proche de toi, elle est dans ta
bouche et dans ton coeur, pour que tu la fasses.
15 Vois: je mets aujourd'hui devant toi la vie et le bonheur,
la mort et le malheur,
16 moi qui t’ordonne aujourd'hui d'aimer le SEIGNEUR ton
Dieu, de suivre ses chemins, de garder ses commandements, ses lois et ses
coutumes.
1
Corinthiens 2
Moi-même, quand je suis venu chez vous, frères, ce
n'est pas avec le prestige de la parole ou de la sagesse que je suis venu vous
annoncer le mystère de Dieu.
2 Car j'ai décidé de ne rien savoir parmi vous,
sinon Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié.
3 Aussi ai-je été devant vous faible, craintif et
tout tremblant:
4 ma parole et ma prédication n'avaient rien des
discours persuasifs de la sagesse, mais elles étaient une démonstration faite
par la puissance de l'Esprit,
5 afin que votre foi ne soit pas fondée sur la
sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu.
6 Pourtant, c'est bien une sagesse que nous
enseignons aux chrétiens adultes, sagesse qui n'est pas de ce monde ni des
princes de ce monde, voués à la destruction.
7 Nous enseignons la sagesse de Dieu, mystérieuse
et demeurée cachée, que Dieu, avant les siècles, avait d'avance destinée à
notre gloire.
8 Aucun des princes de ce monde ne l'a connue, car
s'ils l'avaient connue, ils n'auraient pas crucifié le Seigneur de gloire.
Matthieu 5
17 Ne
croyez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes; je suis venu
non pour abolir, mais pour accomplir.
Méditation :
Ce qui m’intéresse le plus, dans
ce verset, c’est l’arrimage opéré par Jésus entre la loi les prophètes. Tout
comme on vient de le lire, c’est le verbe « abolir » qui est utilisé,
mais ce verbe a aussi le sens de délier. En plus, le petit mot « ou »
ne marque pas une séparation entre la loi et les prophètes. Ce n’est pas la loi
« ou bien » les prophètes. Utilisé dans la même phrase avec le verbe
délier et surtout ensuite avec le verbe accomplir, ce « ou » prend
presque la valeur d’un « et ».
Il y a un lien essentiel entre
loi et prophètes, un lien tellement essentiel qu’on peut dire que la loi sans
les prophètes est nocive, et qu’il est de même pour les prophètes sans la loi.
La loi est nocive sans les
prophètes, presque la moitié de l’ancien testament ne parle pas d’autre chose
que de cela – et une bonne partie du nouveau testament aussi : dès qu’une
parole de Dieu est reçue et qu’elle vient s’incarner dans une forme sociale suffisamment
stable (place de justice, Royauté, Temple…), ceux qui gèrent cette forme
sociale risquent d’oublier – oublient – le message initial et essentiel. Alors
ce qui était parole de Dieu – nous conservons l’expression sans trop
l’expliciter – dégénère en une forme dominante, contraignante, et parfois
oppressive…
Alors, en face de cela, se dresse
parfois un prophète, un homme seul qui conteste, rappelle le message et tâche
de corriger ce qui peut l’être… Trois noms, pour illustrer cela : Samuel,
face à la vieille dynastie corrompue des juges à Silo (1 Samuel 2,12-4,1) ;
Nathan, face à un David plus occupé à satisfaire ses royales pulsions qu’à
servir le Seigneur (2 Samuel 12) ; Jérémie, face à des prêtres plus
occupés à sauver leurs privilèges qu’à rendre un culte à Dieu (Jérémie 36)…
Dieu est grand de susciter des
Prophètes lorsque sa parole est corrompue par ceux à qui elle avait été
adressée…
Mais, puisque Jésus rappelle un
arrimage essentiel entre la loi et les prophètes, on peut se demander si les
prophètes ne sont pas déjà présents dans la loi. Pour le dire autrement, n’y
a-t-il pas une sorte de principe prophétique qui est indiqué même dans la
lettre de la loi ?
Le 30ème chapitre du
Deutéronome donne ceci :
14 Oui, la parole est toute proche de toi, elle est dans ta
bouche et dans ton coeur, pour que tu la fasses.
15 Vois: je mets aujourd'hui devant toi la vie et le
bonheur, la mort et le malheur,
16 moi qui t’ordonne aujourd'hui d'aimer le SEIGNEUR ton
Dieu, de suivre ses chemins, de garder ses commandements, ses lois et ses
coutumes.
Lors du culte de Pentecôte
2016, il était question alors de Lévitique 20, avec sa collection hallucinante
de commandements extrêmes, mais au cœur de cette liste, il y a les stupéfiants
versets 7 et 8 : le verbe garder, garder la lettre des
commandements, des lois, des coutumes, et le verbe faire, garder la
lettre n’est pas la même chose que faire, c'est-à-dire mettre en œuvre… (culte de Pentecôte:
http://predicationdejeandietz.blogspot.fr/2016/05/sur-la-sanctification-et-lobservance.html)
http://predicationdejeandietz.blogspot.fr/2016/05/sur-la-sanctification-et-lobservance.html)
On a ici quelque chose d’un peu semblable, avec le
doublet suivre (les chemins du Seigneur) et garder ses
commandements, lois et coutumes. Ce n’est pas parce qu’on garde les
commandements avec une vigilance de dogue qu’on suit les chemins du Seigneur.
Garder, c’est un verbe statique, suivre, un verbe de mouvement…
Le principe prophétique, avec ce verbe suivre
est bien présent à l’intérieur même du commandement.
L’arrimage entre loi et prophètes, c’est ce que
nous méditons. La loi sans les prophètes peut être totalement nocive et, en
quelque manière, notre Seigneur a payé de sa vie de s’être confronté à une loi
qui s’était figée, sédimentée, dans l’observance rituelle et surtout dans le
pouvoir des prêtres du Temple…
Paul aura eu à traiter le
problème inverse, c'est-à-dire le problème d’un prophétisme oublieux de la loi.
Le Saint Esprit avait été répandu fort généreusement sur l’Eglise de Corinthe. Mais
les très abondantes bénédictions du Saint Esprit aboutirent là à des conflits destructeurs,
sans règles et sans fin… (1 Corinthiens 12-13 et 14), conflits si dramatiques
que Paul, mettant en jeu tout son génie d’écrivain, produira cet hymne unique
sur l’amour.
Corinthe, c’est l’inspiration sans la règle, c’est
le prophétisme sans la loi, la folie sans la sagesse. Paul toutefois, lucide –
et un peu fou dans sa foi – grand penseur et grand écrivain – aura l’idée
étrange et géniale de parler d’une sagesse, mais comme toute sagesse peut
devenir le radotage de gens aigris, amers, voire vindicatifs, Paul parlera
d’une sagesse qui n’est pas humaine, il parlera de la sagesse de Dieu.
« N’imaginez pas que je sois venu pour abolir
la loi ou les prophètes; je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir. »
Loi et prophètes : pas l’un sans l’autre,
toujours l’un avec l’autre, l’un dans l’esprit de l’autre, d’un accomplissement
toujours espéré, et toujours excessivement fragile…
Puissions-nous être fous et sages, vivre avec la
loi et dans l’esprit des prophètes.